Conditions de validité d’une clause de non-concurrence post-contractuelle – CA Bourges, 2 mai 2013, RG n°12/00818

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GRANDMAIRE Justine

Counsel - Docteur en droit

Les clauses de non-concurrence dites post-contractuelles sont ainsi parfaitement licites, dès lors que certaines conditions sont respectées. Elles doivent être limitées dans le temps et dans l’espace et être légitimes.

Avertissement : depuis la publication de cet article, le 1er juin 2013, la loi n°2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques (dite « Loi Macron ») a introduit deux nouveaux articles au code de commerce (L.341-1 et L.341-2) concernant notamment le régime juridique des clauses de non-concurrence et de non-affiliation post-contractuelles : CLIQUEZ ICI pour une analyse des articles L.341-1 et L.341-2 du code de commerce.

Les clauses de non-concurrence – clauses par lesquelles le franchisé s’interdit, dans des limites de temps et d’espace définies, d’exercer une activité identique ou similaire à celle du réseau du franchiseur – sont très fréquentes dans les contrats de franchise. Elles peuvent s’appliquer durant l’exécution du contrat qui lie le franchisé au franchiseur, mais elles peuvent également survivre à l’expiration de celui-ci.

Les clauses de non-concurrence dites post-contractuelles sont ainsi parfaitement licites, dès lors que certaines conditions sont respectées. Elles doivent être limitées dans le temps et dans l’espace et être légitimes (c’est-à-dire être proportionnées à la protection des intérêts du franchiseur au regard de l’objet du contrat).

Les conditions de validité de la clause de non-concurrence sont définies par la jurisprudence, en tenant compte des circonstances (notamment du secteur) dans lesquelles s’inscrit la présence de la clause dans un contrat.

La décision rendue par la Cour d’appel de Bourges le 2 mai dernier est l’occasion de revenir sur ces conditions.

Le contrat de franchise concernant l’exploitation d’un concept de restauration rapide contenait une clause qui interdisait au franchisé, pendant une durée d’un an après l’expiration du contrat, de s’intéresser directement ou indirectement, pour quelque cause et sous quelque forme que ce soit, à la conception ou à l’exploitation de tout établissement de fabrication, de vente de produits alimentaires ou de restauration rapide d’une enseigne concurrente à celle du franchiseur, dans un rayon de 50 km à vol d’oiseau du point vente qu’il exploitait ou de tout autre franchisé du groupe.

Le franchisé lié par cette clause prétendait que celle-ci était nulle. C’est donc dans ces conditions que les magistrats ont eu à apprécier ladite clause et ont ainsi rappelé que :

concernant la limitation temporelle : le fait de prévoir une clause de non-concurrence limitée à une durée d’un an après la cessation du contrat correspond à ce qui est couramment admis par la jurisprudence et est conforme à la réglementation européenne ;

concernant la limitation spatiale : le fait que la clause de non-concurrence s’applique sur un périmètre de 50 km n’est en rien abusif dans la mesure où cela correspond à la distance effectuée par les clients qui, satisfaits d’un point de restauration, suivent le déplacement de l’établissement conforme à leur goût dans un même département ;

concernant le caractère proportionné de la clause aux intérêts légitimes du franchiseur : dans la mesure où le franchiseur fait bénéficier les franchisés du réseau de son savoir-faire commercial et technique, il est donc parfaitement légitime qu’il protège les intérêts de son réseau et des autres franchisés (qui bénéficient de la marque, de l’enseigne, de l’assistance et de son savoir-faire), étant précisé qu’il s’agissait ici de protéger particulièrement les intérêts d’un franchisé implanté dans la même agglomération.

concernant l’existence d’une contrepartie financière à l’obligation de non-concurrence post-contractuelle : il ne s’agit pas, en matière de franchise, d’une condition de validité d’une telle clause.

La clause de non-concurrence post-contractuelle a donc été reconnue comme étant parfaitement valide par la Cour d’appel. 

 

Article paru sur Toute la Franchise : www.toute-la-franchise.com, le 4 juin 2013

 

A rapprocher : La clause de non-concurrence post-contractuelle dans les contrats de distribution (Panorama de jurisprudence et Prospective)

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