Fenêtre sur l’Afrique Subsaharienne

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ALBARIC Cristelle

Avocat associée - Docteur en droit

Dans le prolongement du voyage officiel de la Ministre du Commerce Extérieur, les 18 et 19 novembre derniers en Côte d’Ivoire et au Ghana, nous avons décidé de mettre la lumière sur l’Afrique Subsaharienne. 

Dans le prolongement du voyage officiel de la Ministre du Commerce Extérieur, Madame Nicole Bricq, les 18 et 19 novembre derniers en Côte d’Ivoire et au Ghana, nous avons décidé de mettre la lumière sur l’Afrique Subsaharienne, une des zones prioritaires sur laquelle la Ministre souhaite voir développer les échanges commerciaux.

La situation géographique

L’Afrique subsaharienne (soit 51 pays au total) regroupe tous les pays de l’Afrique à l’exclusion des pays d’Afrique du Nord (i.e. Maroc, Algérie, Egypte, Lybie et Tunisie).

La situation économique

Une croissance positive –  La Banque Mondiale indiquait en juin dernier que les perspectives économiques de l’Afrique subsaharienne sont positives avec un taux de croissance de 5,3% en 2012 et 5,6% en 2013. Si l’on exclut l’Afrique du Sud, le taux de croissance de la région devrait atteindre 6%.La tendance s’est du reste généralisée, avec plus d’un tiers des pays d’Afrique subsaharienne affichant des taux de croissance égaux ou supérieurs à 6%, et près de 40% des pays de la région enregistrant une croissance entre 4 et 6%.Plus récemment, dans son bulletin du 31 octobre dernier, le Fond Monétaire International précisait que, d’après les projections de son dernier rapport sur les perspectives économiques régionalesde l’Afrique subsaharienne, la croissance du Produit Intérieur Brut régional devrait être de l’ordre de 5% en 2013 pour atteindre 6% en 2014(les pays exportateurs de pétrole et les pays à faible revenu affichant les meilleurs résultats). Il ressort ainsi que la région est la plus dynamique à l’échelle mondiale après l’Asie du Sud-Est, même si les rythmes de croissance varient à l’intérieur même de la région subsaharienne.

Les flux d’investissements – Les Flux d’Investis-sements directs Etrangers (IDE), après avoir nette- ment diminué en 2009 et 2010, ont fait un bond de 25% en 2011, pour atteindre, selon les estimations, 35,6 milliards de dollars. Si les ressources naturelles demeurent le principal pôle d’attraction des IDE enAfrique, au-delà des matières premières, les investisseurs étrangers cherchent les consommateurs africains. Les produits de base sont de puissants moteurs de croissance à court terme, et le secteur manufacturier et des services gagnent du terrain (notamment les télécommunications) alors qu’augmente le pouvoir d’achat d’une classe moyenne émergente.

Le facteur démographique

La population mondiale estimée, à mi-2013, à 7,2 milliards devrait augmenter de près d’un milliard de personnes au cours des douze prochaines années, pour atteindre 8,1 milliards en 2025 et 9,6 milliards en 2050. L’Afrique représente aujourd’hui un peu plus de 15% de la population mondiale. Lors de la conférence de presse des Nations Unies en juin 2013 sur le rapport relatif à la révision de 2012 des perspectives de la population mondiale (rapport révisé tous les deux ans), il a été souligné qu’au niveau des pays, la croissance générale d’ici à 2050 devrait intervenir dans les pays qui connaissent un taux de fécondité important, principalement en Afrique, ainsi que dans des pays déjà fortement peuplés tels l’Inde, l’Indonésie, le Pakistan, les Philippines ou les États-Unis.Les changements démographiques et sociaux que connaît l’Afrique sont donc de nouveaux moteurs de croissance interne. L’urbanisation, la hausse de la population active et l’avènement de la classe moyenne sont autant de facteurs pouvant stimuler la croissance. Le rapport sur le commerce et le développement 2013, publié le 12 septembre dernier par les Nations Unies (CNUCED), indique que, selon un certain nombre de prévisions, la proportion de la classe moyenne dans la population mondiale totale devrait passer de 26% en 2009 à 41% en 2020 et à 58% en 2030, et augmenter de plus du quadruple dans les pays en développement :

  • l’Asie devrait connaître la plus forte progression et le nombre de personnes appartenant à la classe moyenne dans cette région devrait être multiplié par 6;
  • en Amérique centrale et en Amérique du Sud, ce nombre devrait être multiplié par 2,5 et ;
  • il devrait tripler en Afrique subsaharienne.

En 1980, à peine 28% des africains vivaient dans des villes. Aujourd’hui, c’est le cas de 40% du milliard de personnes que recense ce continent, soit une proportion approximativement analogue à celle observée en Chine et supérieure à celle qu’enregistre l’Inde. Selon les projections, en 2030, la moitié des africains vivront dans les villes et les 18 premières villes d’Afrique disposeront d’un pouvoir d’achat annuel combiné de 1 300 milliards de dollars. 

Le cadre juridique

Le droit des affaires en Afrique subsaharienne a été marqué par l’adoption, par de nombreux pays africains, du traité relatif à l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA). Signé en 1993, le traité instituant l’OHADA poursuit comme objectif principal l’unification du droit des affaires afin d’assurer la sécurité juridique et judiciaire des activités économiques, de restaurer la confiance des investisseurs et de faciliter les échanges entre les Etats parties.Les autres objectifs du traité sont les suivants :

  • mettre à la disposition de chaque Etat des règles communes simples, modernes et adaptées à la situation économique ;
  • promouvoir l’arbitrage comme instrument rapide et discret des litiges commerciaux ;
  • améliorer la formation des magistrats et des auxiliaires de justice ;
  • favoriser l’institution d’une Communauté Economique Africaine.

L’OHADA regroupe aujourd’hui 17 États (Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Comores, Congo, Côte d’Ivoire, Gabon, Guinée Bissau, Guinée, Guinée Equatoriale, Mali, Niger, République Centrafricaine, République Démocratique du Congo, Sénégal, Tchad, Togo). Les langues de travail sont le français, l’anglais, l’espagnol et le portugais.

Le droit de l’OHADA est ainsi utilisé pour propulser le développement économique et créer un vaste marché intégré afin de faire de l’Afrique un « pôle de développement ».

Pour réaliser ces objectifs, l’OHADA s’est dotée d’un système institutionnel structuré autour des organes que sont (i) la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement, (ii) le Conseil des ministres (composé des ministres en charge de la justice et des finances des Etats parties) et (iii) le Secrétariat permanent qui est l’organe exécutif chargé d’assister le Conseil des ministres et de coordonner la préparation et le suivi de la procédure relative à l’adoption des Actes uniformes.

Deux autres organes spécialisés complètent le système institutionnel. Il s’agit de :

  • la Cour commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA (composée de neuf juges, non un organe de représentation des Etats Partis) et,
  • l’École Régionale Supérieure de la Magistrature.

La Cour commune de Justice et d’Arbitrage de l’OHADA est compétente pour connaître, en cassation, des pourvois contre les décisions rendues en dernier ressort en application des Actes uniformes de l’OHADA par les juridictions nationales des États parties. En cas de cassation, elle a le pouvoir d’évoquer afin de vider le contentieux sans aucun renvoi à une juridiction nationale. L’Ecole Régionale Supérieure de la Magistrature a vocation à former les professionnels de l’OHADA et à perfectionner leurs compétences. Elle est également un centre de recherche en droit des affaires. L’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affairescompte à son actif neuf Actes uniformes déjà entrés en vigueur dans les États parties, à savoir l’Acte uniforme : 

  1. relatif au droit commercial général (1997, révisé en 2010),
  2. relatif au droit des sociétés commerciales et du GIE (1997),
  3. portant organisation des sûretés (1997, révisé en 2010),
  4. portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution (1998),
  5. portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif (1998),
  6. relatif au droit de l’arbitrage (1999),
  7. portant organisation et harmonisation des comptabilités d’entreprises (2000),
  8. relatif aux contrats de transport de marchandises par route (2003),
  9. relatif au droit des sociétés coopératives (2010).

D’autres Actes uniformes sont en préparation sur le droit des contrats, le droit du travail et le droit de la vente aux consommateurs. Les 21 et 22 novembre 2013, se tenait à Libreville, en République Gabonaise, la première édition du Symposium Juridique de Libreville, sur le thème « Comment fabrique-t-on le droit en Afrique ? ».

Cet évènement avait pour vocation de mettre en perspectives le droit des affaires à l’échelle africaine (notamment à la lumière du bilan des 20 ans de l’OHADA) et son adaptation aux enjeux du monde contemporain.


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