Portée de la résiliation de l’un des contrats d’un ensemble contractuel

Cass. com., 4 juillet 2018, n°17-15.597

La Haute juridiction précise la portée de la résiliation de l’un des contrats en présence de contrats interdépendants incluant une location financière.

La société A. a souscrit auprès de la société B. deux contrats, l’un portant sur la location d’un équipement de télésurveillance financé par un contrat de location financière, l’autre sur la maintenance desdits matériels. Les matériels objets de ces contrats ont été cédés à la société C.

La société B., prestataire, a été mise en liquidation judiciaire sans poursuite d’activité le 13 février 2012, date à laquelle le juge commissaire a constaté l’absence de maintenance depuis cette date et en a tiré les conséquences en prononçant la résiliation du contrat de maintenance.

Par suite, la société A. a notifié à la société C. la résiliation du contrat le 17 septembre 2012. Cette dernière l’a alors assignée aux fins de constatations de la résiliation du contrat de location financière et paiement d’une indemnité de résiliation contractuelle.

La Cour d’appel a prononcé la résiliation du contrat de location financière et du contrat de maintenance à la même date du 13 février 2012, date à laquelle la société C. a cessé d’exécuter ses obligations, et a condamné cette dernière à rembourser les loyers payés par la société A.

Aux termes de son pourvoi, la société C. a fait grief à l’arrêt de prononcer la résiliation du contrat de maintenance à la date à laquelle la société B. avait cessé d’exécuter ses obligations, alors qu’elle n’avait pas été entendue ni même appelée en cause, et que le juge commissaire à la liquidation ne s’était prononcé que sur la résiliation du contrat de maintenance.

Dans l’arrêt commenté, la Haute juridiction confirme le principe établi selon lequel dans un ensemble contractuel, l’anéantissement de l’un des contrats (le contrat de prestation en l’espèce) est un préalable nécessaire à la caducité de l’autre (le contrat de location financière en l’espèce). Cet arrêt se situe dans la ligne de l’arrêt de principe du 17 mai 2013 (voir également dans le même sens : Cass. com., 12 juillet 2017, pourvoi n°15-23.52, Cass. com., 12 juillet 2017, pourvoi n°15-27.703). Cette sanction de caducité est d’ailleurs consacrée par la réforme du droit des contrats issue de l’ordonnance du 10 février 2016, au nouvel article 1186 du code civil. Le deuxième alinéa de cet article énonce ainsi que « lorsque l’exécution de plusieurs contrats est nécessaire à la réalisation d’une même opération et que l’un d’eux disparaît, sont caducs les contrats dont l’exécution est rendue impossible par cette disparition et ceux pour lesquels l’exécution du contrat disparu était une condition déterminante du consentement d’une partie ».

Le présent arrêt commenté apporte toutefois une précision inédite puisque la Cour de cassation ajoute qu’il n’est pas exigé que l’anéantissement préalable et la caducité soient prononcés ou constatés au cours d’une seule et même instance.
Il en résulte que, la résiliation du contrat de maintenance ayant été préalablement prononcée par le juge-commissaire, il n’était pas nécessaire de mettre en cause le liquidateur judiciaire de la société B. pour que la caducité du contrat de location financière conclu avec la société C. soit acquise à la même date, bien qu’elle ait été prononcée postérieurement par les juges du fond.

La Cour de cassation semble donc reconnaitre en présence de contrats interdépendants une automaticité de la sanction de caducité des autres contrats lorsque la résiliation de l’un d’entre eux est prononcée.

A rapprocher :  Cass. com., 12 juillet 2017, n°15-23.552 et n°15-27.703

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