Contrat de franchise et distribution sélective

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RICHARD Sandrine

Avocat associée

Définitions, ressemblances, différences et intérêts de la distinction

Comme le contrat de franchise, le contrat de distribution sélective est conclu entre deux commerçants indépendants : le distributeur sélectif commercialise les produits acquis auprès du fournisseur et qui portent sa marque ; le franchisé commercialise les produits fournis par le franchiseur et qui en portent souvent la marque.

Définitions :

  • Contrat de franchise

Le contrat de franchise se caractérise par trois éléments caractéristiques. Un premier élément déterminant consiste dans la communication d’un savoir-faire, matérialisé par des connaissances techniques ou des procédés commerciaux originaux. Un deuxième élément essentiel regroupe tous les signes communs mis à la disposition du franchisé et, en particulier, l’enseigne, le nom commercial et la marque. Un troisième élément est caractérisé par l’assistance fournie par le franchiseur. Tout contrat ne prévoyant pas ces trois éléments (savoir-faire, assistance et signes distinctifs) ne peut être qualifié de contrat de franchise. Cette définition peut expliquer que le contrat de franchise soit répandu dans les secteurs les plus divers.

  • Contrat de distribution sélective

La distribution sélective se définit comme le contrat par lequel, d’une part, le fournisseur s’engage à approvisionner dans un secteur déterminé un ou plusieurs commerçants qu’il choisit en fonction de critères objectifs de caractère qualitatif, sans discrimination et sans limitation quantitative injustifiées, et par lequel, d’autre part, le distributeur est autorisé à vendre d’autres produits concurrents (Cass. crim., 3 nov. 1982 (3 arrêts), « Lanvin », Bull. crim. n°23). Ce type de contrat tend « essentiellement par les obligations réciproques que s’imposent les co-contractants à assurer, spécialement dans le commerce de produits requérant une haute technicité ou dans celui d’articles de marque ou de luxe, un meilleur service au consommateur » et ne pas avoir pour effet, même indirect, « de limiter la liberté du revendeur de fixer lui-même, comme il l’entend, le prix de vente du produit » pour légitimer le refus de vente aux commerçants n’entrant pas dans les critères définis. Par ailleurs, la CJCE considère que « des systèmes de distribution sélective constituent, parmi d’autres, un élément de concurrence conforme à l’article 85, paragraphe 1, du traité à condition que le choix des revendeurs s’opère en fonction de critères objectifs de caractère qualitatif relatifs à la qualification professionnelle du revendeur, de son personnel et de ses installations, et que ces conditions soient fixées d’une manière uniforme à l’égard de tous les revendeurs potentiels et appliquées de façon non discriminatoire » (CJCE, 25 oct. 1983, Allgemeine Elektrizitäts-Gesellschaft AEG-Telefunken AG, aff. 107/82, Rec. CJCE 1983, p. 3151 ; CJCE, 10 juill. 1980, Lancôme, aff. 99-79, Rec. CJCE, p. 2511 ; CJCE, 25 oct. 1977, Metro SB-Großmärkte GmbH & Co. KG, aff. 26/76, Rec. CJCE, p. 1875). Quant à la définition retenue par le règlement des Communautés européennes du 22 décembre 1999, il pourrait laisser penser que le contrat de franchise est une catégorie de contrat de distribution sélective, dans la mesure où le franchiseur est tenu de sélectionner les franchisés selon leur capacité à réitérer le savoir-faire. Selon le règlement, « un « système de distribution sélective » est un système de distribution dans lequel le fournisseur s’engage à vendre les biens ou les services contractuels, directement ou indirectement, uniquement à des distributeurs sélectionnés sur la base de critères définis, et dans lequel ces distributeurs s’engagent à ne pas vendre ces biens ou ces services à des distributeurs non agréés  ». Par le contrat de distribution sélective, le fournisseur de produits choisit ses distributeurs en fonction de critères objectifs et qualitatifs relatifs à la qualification professionnelle des distributeurs qu’il aura déterminés lui-même en fonction de la nature du produit, et s’engage auprès de ses cocontractants à ne fournir aucun commerçant ne remplissant pas les critères. Le contrat de distribution sélective ne comporte, pour le distributeur, aucune obligation d’exclusivité d’approvisionnement. Cette définition peut expliquer que le contrat de distribution sélective soit répandu dans le secteur du luxe (bijouterie, parfumerie, habillement haut de gamme).

 

Ressemblances :

Comme le contrat de franchise, le contrat de distribution sélective est conclu entre deux commerçants indépendants : le distributeur sélectif commercialise les produits acquis auprès du fournisseur et qui portent sa marque ; le franchisé commercialise les produits fournis par le franchiseur et qui en portent souvent la marque.

 

Différences :

Primo, le contrat de franchise se distingue du contrat de distribution sélective, par son objet : alors que le contrat de distribution sélective a pour objet la commercialisation de produits, le contrat de franchise a pour objet la mise en œuvre du savoir-faire issu de l’expérience du franchiseur par les franchisés. Il s’ensuit que le contrat de franchise, qui peut porter sur des produits autant que sur des services, est susceptible de trouver une application beaucoup plus large que le contrat de distribution sélective, qui est limité au commerce de produits spécifiques, comprenant notamment les produits de luxe et de haute technologie. Deuxio, le franchiseur, dont le savoir-faire commercial a vocation à être réitéré dans le cadre de la franchise, est nécessairement distributeur, contrairement au fournisseur, qui peut n’être que fabricant. Tertio, le contrat de distribution sélective implique uniquement la vente par le fournisseur de ses produits à des distributeurs sélectionnés et exclusivement à eux. Il n’implique donc, pour le fournisseur, ni mise à disposition du distributeur d’une enseigne, ni transmission d’un savoir-faire, ni assistance, et, pour le distributeur, aucun paiement de redevance.

 

Intérêts de la distinction :

Un franchisé peut invoquer la requalification de son contrat en contrat de distribution sélective afin de justifier la résiliation à laquelle il aurait procédé en se fondant sur le fait que son cocontractant a fourni des distributeurs ne répondant pas aux critères de sélection impérativement prévus.

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