Inapplicabilité manifeste de la clause compromissoire

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GRANDMAIRE Justine

Counsel - Docteur en droit

Cass. civ. 1ère, 13 juillet 2016, pourvoi n°15-19.389

Le fait que l’une des parties à la convention d’arbitrage ne soit pas en mesure de faire face au coût de la procédure d’arbitrage ne constitue pas un cas d’inapplicabilité manifeste de la clause compromissoire.

Ce qu’il faut retenir : Le fait que l’une des parties à la convention d’arbitrage ne soit pas en mesure de faire face au coût de la procédure d’arbitrage ne constitue pas un cas d’inapplicabilité manifeste de la clause compromissoire.

Pour approfondir : L’article 1442 alinéa 2 du Code de procédure civile définit la clause compromissoire comme « la convention par laquelle les parties à un ou plusieurs contrats s’engage à soumettre à l’arbitrage les litiges qui pourraient naitre relativement à ce ou à ces contrats ».

La clause compromissoire est applicable, à moins qu’elle ne soit manifestement nulle.

La jurisprudence rappelle fréquemment que la clause compromissoire « manifestement inapplicable » est d’application restrictive.

Une inapplicabilité manifeste suppose que celle-ci doit être évidente ; s’il est nécessaire de procéder à une interprétation de la clause compromissoire ou de la convention d’arbitrage, alors l’inapplicabilité n’est pas manifeste.

La Cour de cassation a de nouveau eu l’occasion de donner une illustration de cette notion au travers de l’arrêt rendu le 13 juillet dernier.

En l’espèce, la société A. était en relation avec les sociétés B. et D. et avaient à ce titre conclu des contrats pour encadrer leurs relations, lesquels contenaient une clause compromissoire prévoyant que « en cas de différend (…) découlant du présent contrat ou en relation avec celui-ci, y compris toute question se rapportant à son existence, sa validité ou sa résiliation, les parties doivent déployer tous les efforts pour régler immédiatement le différend à l’amiable » et qu’à défaut d’accord entre les parties, « ledit différend doit être soumis à l’arbitrage exécutoire suivant le règlement de conciliation et d’arbitrage de la Chambre commerciale par trois arbitres nommés suivant ledit règlement, à moins que les parties ne conviennent de nommer un seul arbitre ».

La société A. assigne ses partenaires sur le fondement de l’article L.442-6 du Code de commerce, s’agissant de la rupture des contrats, devant le Tribunal de commerce. Les sociétés B. et D. soulève l’exception d’incompétence eu égard à la clause compromissoire prévue dans les contrats les liant à la société A.

En première instance, le tribunal de commerce se déclare incompétent. Un contredit est formé à l’encontre du jugement et la Cour d’appel rejette ce contredit.

La Cour de cassation est ensuite saisie du litige par le liquidateur de la société A.

Ce dernier avançait notamment le fait « qu’en toute hypothèse, une convention d’arbitrage est manifestement inapplicable dès lors que l’une des parties, insolvable, est dans l’impossibilité de constituer la provision au paiement de laquelle la saisine de l’arbitre se trouve subordonnée, sauf à consacrer un déni de justice et porter atteinte à la substance même du droit d’accès au juge ».

La Haute Cour conforte la position adoptée par les juges du fond, considérant que l’inapplicabilité manifeste de la clause d’arbitrage ne peut se déduire du seul fait que l’une des parties, en l’occurrence le liquidateur de la société A., ne soit pas en mesure de faire face au coût de la procédure d’arbitrage.

A rapprocher : Cass. civ. 1ère, 28 mars 2013, pourvoi n°11-27.770

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