Vente immobilière : absence de droit de l’acquéreur en cas de report du transfert de propriété

Photo de profil - BARRUET Sophie | Avocat | Lettre des réseaux

BARRUET Sophie

Avocat

Cass. civ. 3ème, 19 septembre 2019, n°18-14.172

Dans le cadre de la conclusion d’un contrat de vente d’un bien immobilier, dès lors que les parties ont convenu de différer le transfert de propriété jusqu’à la régularisation de la vente par acte authentique ou jusqu’à sa consécration par une décision de justice définitive, c’est seulement à cette date que s’opère le transfert de propriété. Ainsi, l’acquéreur n’a aucun droit à l’encontre d’un occupant des lieux antérieurement au transfert, soit pendant une période où il n’était pas encore devenu propriétaire du bien, et ne peut percevoir au titre de cette période aucune indemnité d’occupation.

Aux termes d’une promesse synallagmatique de vente du 6 décembre 2002, une société s’est engagée à vendre à une autre société un immeuble partiellement occupé par des tiers. Les parties ont expressément précisé dans l’acte que le transfert de propriété serait reporté au jour de la constatation de la vente en la forme authentique ou au jour d’une décision de justice définitive. En février 2003, la société venderesse a accordé à un tiers un droit d’occupation d’une partie des locaux jusqu’à la vente effective de l’immeuble. Par un arrêt confirmatif du 28 septembre 2010, les juges ont constaté le caractère parfait de la vente.

L’acquéreur a assigné le tiers occupant des locaux en paiement d’une indemnité d’occupation pour la période comprise entre février 2003 et février 2006. La cour d’appel n’a fait droit à cette demande et la société ayant acquis l’immeuble s’est pourvue en cassation.

La Cour de cassation confirme la décision de la cour d’appel. La Haute juridiction considère que dès lors que les parties ont convenu de différer le transfert de propriété jusqu’à la régularisation de la vente par acte authentique ou jusqu’à sa consécration par une décision de justice définitive, c’est seulement à cette date que s’opère le transfert de propriété. Ainsi, l’acquéreur n’a aucun droit à l’encontre d’un occupant des lieux antérieurement au transfert, soit pendant une période où il n’était pas encore devenu propriétaire du bien, et ne peut percevoir au titre de cette période aucune indemnité d’occupation.

La Cour de cassation relève tout d’abord que les parties avaient prévu, aux termes de la promesse, de différer le transfert de propriété jusqu’à la régularisation de la vente par acte authentique ou jusqu’à sa consécration par décision de justice définitive. Pour rappel, l’article 1583 du Code civil prévoit que la vente « est parfaite entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l’acheteur à l’égard du vendeur, dès qu’on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n’ait pas encore été livrée ni le prix payé ». Toutefois, ce texte n’étant pas d’ordre public, les parties peuvent toujours y déroger.

En l’espèce, conformément à la volonté des parties, la vente est devenue parfaite à la date du prononcé de la décision de justice définitive. La cour d’appel avait exactement retenu que c’est seulement à cette date que s’était opéré le transfert effectif de propriété et non à la date de signature de la promesse, comme le soutenait l’acquéreur. Celui-ci n’avait par conséquent aucun droit sur l’occupant des lieux pour lui réclamer une indemnité d’occupation à une période où il n’était pas encore devenu propriétaire du bien.

A rapprocher : Article 1583 du Code civil

Sommaire

Autres articles

some
Covid-19 et non-paiement des loyers commerciaux pour la période d’avril et mai 2020
Si bailleur et preneur, en période de Covid-19, doivent, de bonne foi, se concerter sur la nécessité d’aménager les modalités d’exécution de leurs obligations respectives, les moyens du locataire – défaut dans l’obligation de délivrance du bailleur et...
some
Précisions nouvelles sur les prêts libellés en francs suisses et les clauses abusives
La CJUE considère que les clauses prévoyant l’allongement de la durée d’un contrat de prêt et l’augmentation du montant des mensualités sont susceptibles de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties.
some
Baux commerciaux : la demande de renouvellement aux clauses et conditions du bail expiré vaut offre de prix du bail en renouvellement
Le bailleur ayant accepté la demande du locataire sollicitant le renouvellement aux clauses et conditions du précédent bail, la demande en fixation du loyer du bail renouvelé doit être rejetée.
some
[VIDÉO] Etat du marché en période de crise sanitaire, par Patrick COLOMER
Patrick COLOMER, Expert judiciaire près de la Cour d’appel de Paris et agréé par la Cour de cassation, intervient dans le cadre de contentieux locatifs et d’indemnités d’éviction.
some
Exploitation illicite : attention aux modifications apportées aux projets commerciaux en cours de réalisation !
Par un arrêt en date du 15 février 2021, la Cour administrative d’appel de Marseille, saisie par l’Association En Toute Franchise, a censuré le refus d’un Préfet de mettre en œuvre les pouvoirs de police qu’il détient en matière d’aménagement…
some
COVID-19 : Fermeture des commerces non essentiels et demande de restitution des loyers payés pendant la période de confinement
La 18ème chambre du tribunal judiciaire de Paris décide que le locataire n’est pas fondé à exciper, au soutien de sa demande de restitution de loyers payés pendant la période de fermeture administrative de son commerce de vente d’objets d’art…