Cession de contrat de franchise et acceptation du franchiseur cessionnaire par le franchisé

CA Montpellier, 5 septembre 2017, n°15/04903

Le juge a estimé que la cession d’un contrat de franchise à un nouveau franchiseur était opposable au franchisé qui l’a accepté de façon non-équivoque et a continué d’exécuter le contrat envers le nouveau franchiseur.

Un contrat de franchise a été conclu en fonction de la personnalité du dirigeant M. X, détenant 50 % du capital social de la société X, et prévoit à l’article 9 des conditions générales une clause de non-concurrence ainsi rédigée :

« 9.1/ Non-concurrence durant l’exécution du contrat : toute modification dans l’activité et/ou la situation du franchisé et de l’intuitu personae telles que définies aux conditions particulières est soumise à l’autorisation préalable du franchiseur, lequel pourra le refuser que pour un motif légitime. Le franchisé s’interdit pendant toute la durée du contrat d’exercer un commerce concurrent à celui des cabinets du réseau de franchise Alliance Sud Expertise en pratiquant la politique commerciale définie à l’annexe I ou en transférant dans des cabinets autres que le cabinet dénommé à l’article 1er du présent contrat intitulé « objet », qu’ils lui appartiennent ou non, les signes distinctifs et les prestations de services exclusives de la franchise. Le franchisé s’interdit par ailleurs d’exercer une autre activité salariée ou non salariée ou en qualité de VRP ainsi qu’en qualité d’associé, gérant, administrateur (‘) d’une entreprise membre d’un réseau concurrent de quelque nature que ce soit (‘). »

Par acte sous seing privé du 1er janvier 2010, la société A30 a cédé à la société G les 14 contrats de franchise constituant le réseau Z, comprenant le contrat conclu avec la société X. Suivant acte sous seing privé du 10 juin 2011, M. X et Mme A, gérants et associés de la société X, ont cédé l’intégralité de leurs parts sociales à la SAS Groupe I, représentée par son président, M. M B et son directeur général, M. NC, moyennant le prix de 210 000 euros. M. B et M. C sont devenus cogérants de la société ASE 34.

Cet acte précise en son article 11 qu’un contrat de franchise a été consenti par la société ASE 30 à la société ASE 34, le 20 décembre 2006 (et non le 20 janvier 2006) et qu’en considération de l’intuitu personae, la cession des parts sociales devait être soumise à l’agrément du franchiseur. Une attestation du 8 juin 2011 émanant de Mme Y, en sa qualité de gérante de la société ASE 30 et de cogérante de la société GFR, a été annexée à l’acte de cession. Elle contient l’agrément de la société Groupe Inka comme nouvelle associée de la société ASE 34 et MM. C et B comme nouveaux cogérants, l’acceptation d’une poursuite du contrat aux mêmes conditions et d’un renouvellement pour une durée de 5 ans expirant le 31 décembre 2016. En juillet 2012, Mme  O D, compagne de M. B et ancienne salariée de la société ASE 34 a créé la Sarl Domitia Expertises qui a intégré le réseau Agenda Diagnostic Immobilier, exerçant une activité concurrente de celle du réseau ASE. Reprochant à M. B, cogérant de la société ASE 34, de participer activement au fonctionnement de cette société concurrente, la société GFR a résilié avec effet immédiat le contrat de franchise pour violation de la clause de non-concurrence et de la clause de confidentialité, par lettre recommandée avec accusé de réception du 12 octobre 2012.

Par jugement du 18 mai 2015, les premiers juges ont notamment dit que ce contrat, conclu intuitu personae, doit être respecté par les gérants successifs de la société ASE 34 puis Inka Expertises.

En cause d’appel, la SARL GFR Développement et la SARL Alliance Sud Expertise 30 font valoir en substance que :

  • l’intuitu personae du contrat de franchise, l’agrément de la société Groupe Inka comme nouvel associé de la société ASE 34 et de MM. B et C, cogérants, permettent de considérer que la clause de non-concurrence vise à la fois cette société mais aussi ses dirigeants ;
  • si l’article 16 du contrat de franchise ne précise pas le nombre de parts sociales que doit détenir l’associé du franchisé, cela sous-entend qu’il importait peu que l’associé ait une part ou plus, puisque l’intuitu personae prévalait.

La Cour d’appel retient que la société ASE 34 devenue Inka Expertises a violé l’obligation de non-concurrence, ce qui constitue un manquement grave selon l’article 16 susvisé et fonde la résiliation anticipée à ses torts exclusifs, à compter du 12 octobre 2012.

A rapprocher : Trib. com. Lyon, 12 juin 2015, n°2014J01221, et le commentaire sous LDR 29 juin 2015

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