Le contrat signé par une société non-immatriculée est nul

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ZANETTE Alissia

Avocat

Cass. com., 9 janvier 2019, n°17-15.386

Le contrat conclu avec une société qui n’a jamais été immatriculée est nul car conclu avec une société dépourvue de personnalité juridique. Partant, il est inutile de rechercher à agir contre la personne physique qui a signé au nom de cette société pour tenter de lui faire supporter l’exécution du contrat, sauf clause contraire. 

Ce qu’il faut retenir : Le contrat conclu avec une société qui n’a jamais été immatriculée est nul car conclu avec une société dépourvue de personnalité juridique. Partant, il est inutile de rechercher à agir contre la personne physique qui a signé au nom de cette société pour tenter de lui faire supporter l’exécution du contrat, sauf clause contraire. Il est donc très important de vérifier la situation de la société avec laquelle on envisage de contracter afin – le cas échéant – d’insérer une clause appropriée permettant d’assurer la validité du contrat.

 

Pour approfondir : Une société a conclu un contrat avec une autre société qui n’était pas immatriculée au jour de la conclusion du contrat (et ne l’a pas plus été par la suite). Le contrat ne précisait cependant pas la réalité de la situation, à savoir que le signataire concluait au nom d’une société « en cours de formation ». Aussi, quand les factures n’ont pas été payées par ladite société, le cocontractant assigna en paiement la personne physique qui avait signé au nom de la société non-immatriculée. La Cour d’appel condamna la personne physique au paiement d’une somme provisionnelle au titre des factures. Pour juger que le signataire personne physique est tenu des actes accomplis, les juges d’appel ont relevé que :

  • le fait que le contrat ne mentionne pas que la société était en cours de formation est sans portée dès lors que la société n’existait pas, et
  • sauf mauvaise foi de sa part, le signataire, qui agissait au nom d’une société qu’il avait tout pouvoir de créer, ne pouvait contracter que dans la perspective de sa création.

La Cour de cassation cassa l’arrêt d’appel en s’appuyant sur le texte très clair des articles 1842 et 1843 du code civil. Selon l’article 1842, les sociétés (autres que les sociétés en participation) jouissent de la personnalité morale à partir de leur immatriculation ; autrement dit, la capacité de conclure un contrat ne naît qu’à compter de l’immatriculation. Selon l’article 1843, ce sont « les personnes qui ont agi au nom d’une société en formation avant l’immatriculation » qui sont tenues des obligations nées des actes ainsi accomplis.

Partant, dès lors que la Cour d’appel avait bien relevé que le contrat avait été conclu par une société dépourvue de personnalité juridique, elle aurait dû en conclure que le contrat était nul et non pas qu’il était applicable au signataire personne physique.

Cette solution n’est pas étonnante mais elle a le mérite de rappeler la vigilance qui doit être portée à la personne de son cocontractant. Il est indispensable de vérifier la situation juridique de la société avec laquelle un contrat doit être signé AVANT de le signer (à l’aide d’un extrait kbis à jour notamment).

Ces vérifications, qui sont en fait relativement simples et rapides, permettront d’anticiper une difficulté d’exécution du contrat par l’insertion d’une clause adaptée à la situation rencontrée.

Pour exemple, dans notre espèce, il aurait fallu prévoir que le signataire personne physique qui signe au nom de la société en cours de formation est tenu personnellement de l’ensemble des engagements découlant du contrat tant que ce contrat n’aura pas été repris par la société régulièrement immatriculée.

A rapprocher : Articles 1145 et suivants du code civil

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