Les différentes catégories de contrat de franchise

Il convient de distinguer cinq catégories de contrat de franchise : la franchise de distribution, la franchise de service, la franchise industrielle, la franchise de comptoir et la franchise financière. La distinction entre ces différentes catégories de contrat repose essentiellement sur la nature du savoir-faire transmis.

1. Classiquement, la jurisprudence distingue trois catégories de contrat de franchise (CJCE, 28 janv. 1986, aff. 161/84, Pronuptia, Rec. CJCE, p. 353) : la franchise de distribution, la franchise de service, la franchise industrielle ; s’y ajoutent la franchise de comptoir et la franchise financière. La distinction entre ces différentes catégories de contrat repose essentiellement sur la nature du savoir-faire transmis.

 

Franchise de distribution :

2. Définitions – Le contrat de franchise distribution est celui dans lequel « le franchisé se borne à vendre certains produits dans un magasin qui porte l’enseigne du franchiseur » (CJUE, 28 janv. 1986, aff. 161/84, Pronuptia : Rec. CJCE, p. 353, att. n° 14). Selon le règlement (CEE) No 4087/88 de la commission du 30 novembre 1988 concernant l’application de l’article 85 paragraphe 3 du traité à des catégories d’accords de franchise (Préambule ; §.3), « la franchise de distribution concerne la vente de produits » (ce Règlement, rappelons-le, n’est plus en vigueur, mais sa définition reste intacte).

3. Particularités et développement de la franchise de distribution – La franchise de distribution peut parfois présenter un risque de confusion avec des contrats de distribution voisins, tels que les contrats de concession et de commission-affiliation par exemple. Les contrats de franchise de distribution contiennent le plus souvent une clause d’exclusivité territoriale et une clause de quasi-exclusivité d’approvisionnement. Dans le cadre d’une franchise de distribution, la présence d’une clause de quasi-exclusivité d’approvisionnement doit être considérée comme valide et légitime lorsqu’elle est nécessaire à la préservation de l’identité commune et de la réputation du réseau, notamment, par la garantie qu’elle apporte d’une qualité uniforme des assortiments distribués (CA Paris, 19 mai 2010 : JurisData n°2010-011820).

La transmission par le franchiseur au franchisé d’un savoir-faire et la fourniture d’une assistance distinguent le contrat de franchise du contrat de concession. Ce savoir-faire ne procède ni d’un mode de fabrication, comme dans la franchise industrielle, ni même d’une méthode portant sur une prestation de service, comme dans la franchise de service, mais d’une technique de commercialisation. En effet, pour reprendre la formule issue de l’arrêt Pronuptia, le franchisé « se borne à vendre certains produits », il le fait (en tout cas est censé le faire) selon la méthode qui lui est communiquée par le franchiseur, que le contrat de franchise lui impose de respecter. Le savoir-faire peut donc porter à la fois sur l’achat (quantité, qualité des produits, moment opportun de l’achat, etc.) et sur la vente (présentation des produits, conseils devant être apportés à la clientèle, aménagement du magasin, etc.). Les produits ainsi vendus par le franchisé peuvent avoir une origine diverse. Selon le cas, ils sont fabriqués par le franchiseur – qui doit également avoir testé sa méthode de vente préalablement à l’ouverture du réseau – ou par des entreprises extérieures, sur les instructions du franchiseur ou librement. Dans de nombreux cas, le réseau est pourvu d’une centrale de référencement – les franchisés se fournissent alors directement auprès des fabricants référencés – ou d’une centrale d’achat; selon les hypothèses, cette dernière achète les produits puis les revend aux franchisés, ou les achète directement pour le compte de ces derniers.

La franchise de distribution concerne environ la moitié des réseaux et demeure la plus courante des catégories de franchise.


Franchise de service :

4. Définitions – Le contrat de franchise de services est celui en vertu duquel un franchisé « offre un service sous l’enseigne, le nom commercial, voire la marque du franchiseur et en se conformant aux directives de ce dernier » (CJUE, 28 janv. 1986, aff. 161/84, Pronuptia : Rec. CJCE, p. 353, att. n° 14). Selon le règlement (CEE) No 4087/88 de la commission du 30 novembre 1988 concernant l’application de l’article 85 paragraphe 3 du traité à des catégories d’accords de franchise (Préambule ; §.3), « la franchise de services concerne la prestation de services ». La doctrine a proposé une définition plus précise mettant l’accent sur le caractère particulièrement développé du savoir-faire dans ce type de franchise: « dans le franchisage de services, le franchiseur met à la disposition de ses franchisés un système standardisé complet pour offrir un service à la clientèle, comprenant des signes de ralliement de la clientèle».

5. Particularités et développement des franchises de service – Au plan pratique, la franchise de service ne concerne ni la vente de marchandises (objet de la franchise de distribution), ni la fabrication de biens (objet de la franchise industrielle), et se distingue donc assez naturellement des autres contrats de distribution. Au plan de la classification, la franchise de services est parfois considérée comme « la figure type du franchisage ». Les obligations essentielles du franchiseur y prennent une importance toute particulière. S’agissant du savoir-faire, la satisfaction de la clientèle dépend, dans ce type de franchise (plus encore que dans la franchise de distribution), du comportement, de la compétence professionnelle du franchisé et de son efficacité. Le franchiseur doit transmettre au franchisé, non une méthode de vente, mais une méthode de travail permettant de rendre service à la clientèle d’une manière se détachant des méthodes traditionnelles, et apportant un avantage par rapport à elles. S’agissant de l’assistance, la franchise de service implique un renouvellement constant du concept. Le franchisé n’est pas lié par l’attrait d’une centrale d’achat lui donnant des avantages particuliers qu’il perdrait en quittant le réseau : si le savoir-faire n’évolue pas, le franchisé a peu d’intérêts à rester dans le réseau une fois ce savoir-faire acquis. S’agissant de la notoriété de l’enseigne, l’image du réseau est tout aussi importante que dans les autres types de franchise : la qualité de l’accueil, la présentation, la propreté du cadre dans lequel le service est rendu joue pour beaucoup dans l’attrait de la clientèle. La franchise de services se différencie grandement de la franchise de distribution et de la franchise industrielle en ce que les locaux exploités par le franchisé ne sont pas « irremplaçables » ; le franchisé pourra aisément changer de locaux – à la différence de la franchise de distribution et de la franchise industrielle –, de sorte que la clause de non-concurrence post-contractuelle ne sera pas contraignante en pratique.

La franchise de service couvre de nombreux domaines, qui ne cessent de se diversifier. Cet aspect est particulièrement marqué dans l’hôtellerie, où la clientèle séjourne dans l’établissement du franchisé.

 

Franchise industrielle :

6. Définitions – Le contrat de franchise industrielle correspond à l’hypothèse où « le franchisé fabrique lui-même, selon les indications du franchiseur, des produits qu’il vend sous la marque de celui-ci» (CJUE, 28 janv. 1986, aff. 161/84, Pronuptia : Rec. CJCE, p. 353, att. n° 14). Selon certains auteurs, le contrat de franchise industrielle ou artisanale est celui qui «met en scène deux industriels (ou artisans)» et par lequel « le premier accorde au second le droit et les possibilités de fabriquer et de commercialiser les produits qu’il a mis au point ».

7. Particularités et développement de la franchise industrielle – Dans la franchise industrielle, le franchisé exerce potentiellement deux types d’activité : il fabrique des biens selon les indications du franchiseur, puis les vend. D’une part, il exerce une activité de fabrication. Le savoir-faire transmis par le franchiseur au franchisé porte donc obligatoirement sur la méthode de fabrication des produits: matériaux, outils, recette s’il s’agit d’un produit alimentaire, qualification requise du personnel, formation de celui-ci, etc. Ce savoir-faire peut en outre concerner la vente des produits, seconde activité du franchisé, et contenir en plus des instructions relatives à la fabrication des indications similaires à celles que l’on retrouve dans la franchise de distribution. Par ailleurs, le franchisé de production doit être le plus souvent à la fois un industriel et un commerçant, ce qui implique de sa part une qualification technique souvent importante, l’image du réseau dépendant au premier chef de la qualité de ses produits. La transmission du savoir-faire est parfois accompagnée en pratique de licences de brevets. Le savoir-faire, qui doit être secret, ne peut consister en une licence de brevet : le procédé objet du brevet, exposé dans la demande de brevet «de façon suffisamment claire et complète pour qu’un homme du métier puisse l’exécuter» et suivant les modalités de l’article R.612-2 du code de la propriété intellectuelle, tombe dans le domaine public à l’expiration du monopole du franchiseur. D’autre part, le franchisé vend les produits qu’il a fabriqués « sous la marque » du franchiseur. La franchise de production revêt ainsi la particularité d’impliquer une licence de marque donnant au franchisé des droits plus étendus que ceux qui sont les siens dans les autres types de franchise : contrairement au franchisé de distribution, qui vend des produits déjà marqués, le franchisé de production appose lui-même la marque du franchiseur sur les produits qu’il a fabriqués. L’importance, en pratique, du nombre de réseaux fondés sur la franchise de production est discutée. Force est de constater toutefois que, si les franchises de distribution et de service représentent une très grande proportion des réseaux de franchise, la franchise de production concerne souvent des entreprises d’importance majeure.

 

Franchise de comptoir :

8. Définition – La franchise de comptoir ne se définit pas par l’objet sur lequel porte le savoir-faire transmis par le franchiseur, mais par le mode d’exploitation du système franchisé. La franchise de comptoir est accordée «pour un comptoir de marque et, par extension, pour une sorte de kiosque, par exemple de parfum, de montres ou de confiserie, installé dans un hôtel, un grand magasin, une grande surface, un aéroport ou un port, au milieu de comptoirs d’articles (ou de services, par exemple de location de voitures) concurrents proposant d’autres marques». La franchise de comptoir peut ainsi consister en un espace délimité consacré par un commerçant traditionnel au sein de sa boutique à l’exploitation du concept franchisé, ou en un kiosque installé au sein d’une grande structure abritant d’autres kiosques.

9. Particularités et développement de la franchise de comptoir – La franchise de comptoir peut avoir pour objet des prestations de services ou la distribution de produits. Cependant, en raison des contraintes imposées par la surface restreinte du comptoir, et de sa situation parmi d’autres comptoirs concurrents, les caractères de la franchise s’y retrouvent ici généralement avec moins de force. Certains éléments du savoir-faire, et notamment ceux portant sur l’aménagement du local franchisé et sur la présentation des produits ne peuvent être aussi développés que lorsque ledit local est une boutique. Réciproquement, le droit d’entrée et les redevances dues par le franchisé sont plus faibles que dans un contrat de franchise classique. Cette atténuation des obligations réciproques ne fait pas obstacle – sauf disparition desdites obligations – à la qualification de contrat de franchise, et les franchises de comptoirs obéissent au même régime que les franchises classiques. La franchise de comptoir permet à certains réseaux de franchise d’ouvrir de nombreux points de vente dans des lieux très fréquentés par une clientèle attirée par le regroupement de différents comptoirs, dans les grands magasins et les aéroports. Par ailleurs, lorsqu’un comptoir est formé à l’intérieur de la boutique d’un commerçant, il peut constituer une étape, le commerçant concerné pouvant décider ultérieurement de consacrer l’intégralité de son local au réseau, et s’engager par un contrat de franchise classique.

 

Franchise financière :

10. Définition – La franchise financière est une « modalité d’application» du contrat de franchise reposant sur une « dissociation des fonctions d’investissement et de gestion » : sa nature financière ne dépend en rien de la nature du savoir-faire transmis.

11. Particularités et développement de la franchise financière – Certains secteurs qui peuvent être exploités sous forme de franchise, tels que l’hôtellerie et la restauration, supposent de très larges investissements. Les franchiseurs, qui éprouvent alors des difficultés à trouver des franchisés ou à exploiter en propre ce type de structure trouvent un intérêt à dissocier le financement de l’opération, confié à des investisseurs, et la gestion de l’établissement, qui implique des compétences particulières.

La franchise financière permet de confier le financement de l’opération à des investisseurs, et la gestion de l’établissement à une personne compétente, mais ne disposant pas de fonds suffisants. Le premier type de franchise financière suppose un contrat de franchise classique entre un franchiseur et un franchisé. La particularité réside dans le fait que le local est consenti à bail au franchisé ou au franchiseur par la SCI créée par des investisseurs. Un crédit-bail peut également être consenti au franchisé. Le second type de franchise financière met en principe en scène trois personnes et repose sur un double contrat: un contrat de franchise et un contrat de gestion d’entreprise. Un premier contrat de franchise est conclu entre un groupe d’investisseurs et un franchiseur, détenteur d’une marque et d’un savoir-faire; le groupe devient par conséquent franchisé. Un second contrat, dit de gestion d’entreprise, est conclu entre le franchisé et un mandataire. Par ce contrat, «une société propriétaire des murs et de l’équipement d’une entreprise (le propriétaire) en confie la gestion à une société spécialisée dans l’activité projetée (le gestionnaire)».Ce dernier détient alors le droit d’utiliser l’enseigne, le savoir-faire et l’assistance. Ce type de mécanisme implique que le contrat de franchise, contrairement aux contrats de franchise classiques, autorise le franchisé à transmettre ses droits à un tiers. Toutefois, en pratique, le mandataire n’est souvent autre que le franchiseur lui-même, ce qui peut soulever la question de la validité du contrat.

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