Bail commercial : clause résolutoire et pouvoirs du juge

Cass. civ., 3ème, 5 octobre 2017, n° 15-25.018

Le bénéfice d’une clause résolutoire prévoyant la résiliation de plein droit d’un bail commercial, un mois après mise en demeure, en cas de persistance du manquement par le preneur à l’une des obligations stipulées au bail et rappelée au commandement, est acquis sans que le juge n’ait à apprécier la gravité du manquement contractuel.

Ce qu’il faut retenir : Le bénéfice d’une clause résolutoire prévoyant la résiliation de plein droit d’un bail commercial, un mois après mise en demeure, en cas de persistance du manquement par le preneur à l’une des obligations stipulées au bail et rappelée au commandement, est acquis sans que le juge n’ait à apprécier la gravité du manquement contractuel

Pour approfondir : Un contrat de bail commercial est conclu entre la société X et Mr. Y. Le 28 juillet 2006, le bailleur assigne le preneur en nullité du congé avec offre d’indemnité d’éviction et, subsidiairement, en désignation d’un expert pour évaluer cette indemnité. Par jugement du 7 mars 2007, le Tribunal de grande instance de Saint Denis déboute le preneur de sa demande de nullité du congé et confie une expertise sur la valorisation de l’indemnité d’éviction. L’expert commis ayant constaté l’existence d’une sous-location portant sur l’apposition de panneaux publicitaires, le bailleur fait délivrer au locataire, par acte du 17 juin 2008, un commandement visant la clause résolutoire pour sous-location interdite, dont il demande l’acquisition passé le délai d’un mois de cette délivrance.

Statuant sur renvoi après cassation, l’arrêt rendu le 10 avril 2015 par la Cour d’appel de Saint Denis déboute le bailleur de sa demande d’acquisition de la clause résolutoire, au motif que « la gravité de l’infraction doit être considérablement relativisée au regard du type d’occupation (panneaux publicitaires), du caractère dérisoire de la contrepartie (400,00 € par an) et des trois attestations (dont deux émanant de personnes n’ayant aucun lien avec lui) que Z A G H verse aux débats témoignant de l’existence de ces panneaux publicitaires depuis au moins 1976 ».

Par l’arrêt commenté (Cass. civ., 3ème, 5 oct. 2017, n° 15-25.018), la haute juridiction casse l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Saint Denis au visa de l’article 1134 du code civil et retient : « le bénéfice d’une clause résolutoire prévoyant la résiliation de plein droit du bail, un mois après mise en demeure, en cas de persistance du manquement par le preneur à l’une des obligations stipulées au bail et rappelée au commandement, est acquis sans que le juge n’ait à apprécier la gravité du manquement contractuel, la Cour d’appel (…) n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les textes susvisés ».

Cette décision s’inscrit dans le courant de la jurisprudence de la troisième chambre civile, ancienne (Cass. civ. 3ème, 20 juill. 1989, n° 88-13.856) mais tenace (Cass. civ. 3ème, 20 oct. 2016, n°15-18.051), selon laquelle le juge doit, en présence d’une clause résolutoire claire dans le bail commercial, se contenter de vérifier si celle-ci a été (ou non) violée, sans toutefois pouvoir apprécier la gravité du manquement.

A rapprocher : Cass. civ. 3ème, 20 oct. 2016, n° 15-18.051 ; Cass., civ. 3ème, 20 juill. 1989, n° 88-13856 

Sommaire

Autres articles

some
Baux commerciaux : la demande de renouvellement aux clauses et conditions du bail expiré vaut offre de prix du bail en renouvellement
Le bailleur ayant accepté la demande du locataire sollicitant le renouvellement aux clauses et conditions du précédent bail, la demande en fixation du loyer du bail renouvelé doit être rejetée.
some
Covid-19 et non-paiement des loyers commerciaux pour la période d’avril et mai 2020
Si bailleur et preneur, en période de Covid-19, doivent, de bonne foi, se concerter sur la nécessité d’aménager les modalités d’exécution de leurs obligations respectives, les moyens du locataire – défaut dans l’obligation de délivrance du bailleur et...
some
Précisions nouvelles sur les prêts libellés en francs suisses et les clauses abusives
La CJUE considère que les clauses prévoyant l’allongement de la durée d’un contrat de prêt et l’augmentation du montant des mensualités sont susceptibles de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties.
some
[VIDÉO] Etat du marché en période de crise sanitaire, par Patrick COLOMER
Patrick COLOMER, Expert judiciaire près de la Cour d’appel de Paris et agréé par la Cour de cassation, intervient dans le cadre de contentieux locatifs et d’indemnités d’éviction.
some
Exploitation illicite : attention aux modifications apportées aux projets commerciaux en cours de réalisation !
Par un arrêt en date du 15 février 2021, la Cour administrative d’appel de Marseille, saisie par l’Association En Toute Franchise, a censuré le refus d’un Préfet de mettre en œuvre les pouvoirs de police qu’il détient en matière d’aménagement…
some
COVID-19 : Fermeture des commerces non essentiels et demande de restitution des loyers payés pendant la période de confinement
La 18ème chambre du tribunal judiciaire de Paris décide que le locataire n’est pas fondé à exciper, au soutien de sa demande de restitution de loyers payés pendant la période de fermeture administrative de son commerce de vente d’objets d’art…