Limites aux droits conférés par la marque : l’usage honnête dans la vie des affaires

Cass. com., 5 juillet 2017, n°15-28.114

Lorsqu’un signe devient l’appellation usuelle des produits et services désignés dans le dépôt, son titulaire ne peut en interdire l’usage par des tiers.

Ce qu’il faut retenir : Lorsqu’un signe devient l’appellation usuelle des produits et services désignés dans le dépôt, son titulaire ne peut en interdire l’usage par des tiers.

Pour approfondir : Dans cette affaire, le titulaire de la marque Buckfast désignant notamment des produits et services relatifs à l’élevage de reines et d’abeilles a assigné en contrefaçon un apiculteur en contrefaçon pour avoir utilisé les termes buckfast et buck sans autorisation et ce dans le cadre de la commercialisation des produits identiques à ceux énumérés dans l’enregistrement de la marque.

Alors que les juges d’appel avaient retenu la commission d’actes de contrefaçon, la Cour de cassation, au visa de l’article L716-1 du code de la propriété intellectuelle tel qu’interprété à la lumière de l’article 6, paragraphe 1 sous b), de la directive n° 89/ 104/ CEE du 21 décembre 1988 rapprochant les législations des Etats membres sur les marques, va censurer cette décision aux motifs que les juges d’appel auraient dû vérifier si la personne poursuivie en contrefaçon n’avait pas fait un usage honnête d’un signe indispensable à la désignation du produit vendu.

Selon la Haute Cour, au vu des textes ci-avant rappelés : « Le droit conféré par la marque ne permet pas à son titulaire d’interdire à un tiers l’usage, dans la vie des affaires, d’indications relatives à l’espèce, à la qualité, à la quantité, à la destination, à la valeur, à la provenance géographique, à l’époque de la production du produit ou de la prestation du service ou à d’autres caractéristiques de ceux-ci, pour autant que cet usage soit fait conformément aux usages honnêtes en matière industrielle ou commerciale».

Or, les pièces versées aux débats établissaient qu’en 2003 dans les revues spécialisées « Abeilles et fleurs » et « L’abeille de France et l’apiculteur » des annonces mettant en vente des ruches peuplées « Buckfast », ainsi que des essaims et reines sélectionnées issus des élevages « Buck » et qu’à l’époque de ces parutions, les termes buckfast et buck étaient devenus usuels pour désigner un certain type d’abeilles.

Aussi, selon la Cour il en résulte que, dans le cadre d’une offre de transaction entre spécialistes de l’apiculture de l’espèce des abeilles en question, M. X… a utilisé le signe en se conformant aux usages honnêtes en matière industrielle ou commerciale, en faisant ainsi un usage que le titulaire de la marque n’était pas en droit d’interdire.

Voici une illustration des limites au droit sur la marque qui résultent de l’article 6 précité de la directive précitée. Son application est assez rare, car les plaideurs préfèrent le plus souvent s’attaquer à la validité même de la marque contrefaite.

A rapprocher : Article L. 716-1 du code de la propriété intellectuelle ; Directive n° 89/ 104/ CEE du 21 décembre 1988

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