Un permis de construire tacite malgré l’avis défavorable de la CNAC

CAA Bordeaux, 29 mars 2017, n°17BX00889

Alors qu’un permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale ne peut être délivré en cas d’avis défavorable émis par la CNAC, la Cour administrative d’appel de Bordeaux vient toutefois, par un arrêt du 29 mars 2017, préciser que le silence de l’autorité publique compétente fait naître un permis de construire tacite.

Ce qu’il faut retenir : Alors qu’un permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale ne peut être délivré en cas d’avis défavorable émis par la Commission Nationale d’Aménagement Commercial (CNAC), la Cour administrative d’appel de Bordeaux vient toutefois, par un arrêt du 29 mars 2017, préciser que le silence de l’autorité publique compétente fait naître un permis de construire tacite.

Pour approfondir : Le 17 mai 2016, la SCI Le Parc du Béarn, pétitionnaire, a procédé au dépôt d’un dossier de demande de permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale auprès des services instructeurs de la commune de Lons (64142). Le projet portait sur la création d’un centre commercial dénommé « Les Portes du Béarn » comprenant douze moyennes surfaces de secteur non alimentaire d’une surface de vente totale de 15 343 m², situé à l’angle de l’avenue Ampère et au 5 de l’avenue Papin à Lons. Le 6 juillet 2016, la Commission départementale d’aménagement commercial des Pyrénées-Atlantiques a rendu un avis favorable à cette création. Les sociétés Alice, d’une part, et Willis, d’autre part, ainsi que le Préfet des Pyrénées-Atlantiques, ont respectivement déposé un recours contre cet avis, auprès de la CNAC. Cette saisine a entrainé la majoration du délai d’instruction. Par courrier en date du 23 août 2016, à la suite de la saisine de la CNAC, et conformément aux dispositions de l’article R.423-36-1 du Code de l’urbanisme, les services instructeurs de la commune de Lons ont informé la société pétitionnaire du nouveau délai d’instruction de sa demande d’autorisation d’urbanisme de dix mois.

Ce courrier indiquait qu’en l’absence de réponse à l’issue du délai d’instruction, la société pétitionnaire bénéficierait d’un accord tacite à sa demande.

Le 27 octobre 2016, la CNAC a émis un avis défavorable à l’encontre du projet.

Or, l’article L.425-4 du Code de l’urbanisme prévoit qu’en cas d’avis défavorable de la CNAC, le permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale sollicité ne peut être délivré. En effet, un permis de construire ne peut être octroyé que lorsque la CNAC a émis un avis favorable au projet.

Néanmoins, en l’espèce, la commune de Lons n’a pas procédé au rejet explicite de la demande de permis de construire malgré l’avis défavorable de la CNAC.

A l’issue du délai d’instruction de sa demande, la société pétitionnaire a donc pensé être titulaire d’une décision de refus de permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale tacite.

Elle a alors introduit une requête en annulation de la décision implicite de refus de permis de construire née du silence gardé par le maire de Lons sur sa demande déposée le 17 mai 2016, auprès de la Cour administrative d’appel de Bordeaux.

Par un arrêt en date du 29 mars 2017, n°17BX00889, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a rappelé les dispositions des articles R.424-1 et L.425-4 du Code de l’urbanisme :

« A défaut de notification d’une décision expresse dans le délai d’instruction déterminé comme il est dit à la section IV du chapitre III ci-dessus, le silence gardé par l’autorité compétente vaut, selon les cas :

[…]

b) Permis de construire […] » (R.424-1 du Code de l’urbanisme).

« Lorsque le projet est soumis à autorisation d’exploitation commerciale au sens de l’article L.752-1 du Code de commerce, le permis de construire tient lieu d’autorisation dès lors que la demande de permis a fait l’objet d’un avis favorable de la commission départementale d’aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d’aménagement commercial […] » (L.425-4 du Code de l’urbanisme).

Puis, sur le fondement de ces dispositions, les juges administratifs ont déclaré la requête sans objet en considérant que : « S’il résulte de ces dernières dispositions qu’en cas d’avis défavorable de la commission nationale d’aménagement commercial, le permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale ne peut être légalement délivré, et qu’il appartient donc à la commune qui aurait laissé naître un permis tacite de le retirer dans le délai de trois mois prévu par l’article L.424-5, l’article L.425-4 n’a pas modifié le régime général de délivrance des permis de construire, ni édicté une exception au principe selon lequel le silence de l’autorité compétente fait naître un permis de construire tacite. Dans ces conditions, aucun refus tacite n’a pu naître à l’expiration du délai d’instruction de la demande de la SCI Le Parc du Béarn, qui se trouve donc titulaire d’un permis de construire tacite ». 

En effet, l’article L.425-4 du Code de l’urbanisme dispose qu’en cas d’avis défavorable de la CNAC, le permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale ne peut être légalement délivré.

La Cour administrative d’appel de Bordeaux relève cependant que cet article n’a pas procédé à une modification du régime général de délivrance des autorisations d’urbanisme, ni créé une exception au principe selon lequel le silence de l’autorité compétente fait naître un permis de construire tacite. En conséquence, la société pétitionnaire ne pouvait pas exercer un recours contre un refus de permis de construire tacite, puisqu’elle était titulaire d’une autorisation d’urbanisme tacite. En d’autres termes, un avis défavorable de la CNAC ne fait pas obstacle à l’apparition d’un permis de construire tacite.

A rapprocher : CAA Bordeaux, 23 janvier 2017, n°17BX00078

Sommaire

Autres articles

some
Baux commerciaux : la demande de renouvellement aux clauses et conditions du bail expiré vaut offre de prix du bail en renouvellement
Le bailleur ayant accepté la demande du locataire sollicitant le renouvellement aux clauses et conditions du précédent bail, la demande en fixation du loyer du bail renouvelé doit être rejetée.
some
Covid-19 et non-paiement des loyers commerciaux pour la période d’avril et mai 2020
Si bailleur et preneur, en période de Covid-19, doivent, de bonne foi, se concerter sur la nécessité d’aménager les modalités d’exécution de leurs obligations respectives, les moyens du locataire – défaut dans l’obligation de délivrance du bailleur et...
some
Précisions nouvelles sur les prêts libellés en francs suisses et les clauses abusives
La CJUE considère que les clauses prévoyant l’allongement de la durée d’un contrat de prêt et l’augmentation du montant des mensualités sont susceptibles de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties.
some
[VIDÉO] Etat du marché en période de crise sanitaire, par Patrick COLOMER
Patrick COLOMER, Expert judiciaire près de la Cour d’appel de Paris et agréé par la Cour de cassation, intervient dans le cadre de contentieux locatifs et d’indemnités d’éviction.
some
Exploitation illicite : attention aux modifications apportées aux projets commerciaux en cours de réalisation !
Par un arrêt en date du 15 février 2021, la Cour administrative d’appel de Marseille, saisie par l’Association En Toute Franchise, a censuré le refus d’un Préfet de mettre en œuvre les pouvoirs de police qu’il détient en matière d’aménagement…
some
COVID-19 : Fermeture des commerces non essentiels et demande de restitution des loyers payés pendant la période de confinement
La 18ème chambre du tribunal judiciaire de Paris décide que le locataire n’est pas fondé à exciper, au soutien de sa demande de restitution de loyers payés pendant la période de fermeture administrative de son commerce de vente d’objets d’art…