Non-déductibilité des intérêts d’emprunts contractés par le nu-propriétaire de parts sociales

CE 8ème et 3ème ch., 24 février 2017, n°395983

Dans le cas de démembrement de la propriété des parts d’une société de personnes détenant un immeuble donné en location, le nu-propriétaire ne peut pas déduire les intérêts des emprunts contractés pour acquérir la nue-propriété de ses parts.

Ce qu’il faut retenir : Dans le cas de démembrement de la propriété des parts d’une société de personnes détenant un immeuble donné en location, le nu-propriétaire ne peut pas déduire les intérêts des emprunts contractés pour acquérir la nue-propriété de ses parts.
 

Pour approfondir : Il résulte de la combinaison des dispositions des articles 13, 14, 28 et 31 du Code général des impôts que, sauf disposition législative spécifique, seuls les intérêts des emprunts contractés pour l’acquisition de biens ou droits immobiliers destinés à procurer des revenus fonciers sont déductibles du revenu brut foncier.

Ainsi, en cas de démembrement de la propriété de parts d’une société de personnes détenant un immeuble donné en location, seul l’usufruitier de ces parts est soumis à l’impôt sur le revenu à raison de la quote-part correspondante des revenus fonciers perçus par la société, le nu-propriétaire n’étant pas regardé comme disposant d’un revenu à ce titre.

En conséquence, les intérêts des emprunts contractés personnellement par le nu-propriétaire pour financer l’acquisition de la nue-propriété de ces parts ne peuvent être regardés comme une charge exposée en vue de l’acquisition ou la conservation d’un revenu foncier. Ces intérêts ne sont pas non plus déductibles des revenus fonciers que le contribuable percevrait à raison d’autres biens ou droits immobiliers.

En outre, il convient de noter que les règles de déduction des intérêts d’emprunts diffèrent selon le mode de détention de l’immeuble. Ainsi, la doctrine administrative admet la déductibilité des intérêts d’emprunts contractés par le nu-propriétaire pour financer l’acquisition de la nue-propriété de l’immeuble ou les dépenses de réparation, d’entretien ou d’amélioration.

Dans ce cas, la déduction est pratiquée sur les revenus fonciers provenant de ses autres propriétés. A contrario, la déduction n’est pas admise lorsque l’immeuble loué appartient à une société de personnes et que l’emprunt est contracté pour financer l’acquisition de la nue-propriété des parts de cette société (BOI-RFPI-BASE-20-80-20120912 n°160 et 170).

Au cas d’espèce, cette différence de traitement fiscal selon que l’immeuble est détenu directement ou par une société était à l’origine du litige.

Le contribuable avait demandé l’annulation de la doctrine en ce qu’elle refuse au nu-propriétaire de parts sociales, la déduction des intérêts d’emprunts. Le Conseil d’Etat a rejeté cette demande et a posé le principe selon lequel les intérêts d’emprunts contractés par le nu-propriétaire de parts sociales ne sont pas déductibles des revenus fonciers que le contribuable percevrait à raison d’autres biens ou droits immobiliers dès lors que ce dernier ne peut pas être regardé comme disposant d’un revenu.

La question mérite également d’être posée en ce qui concerne les dépenses de travaux prises en charge par le nu-propriétaire.

En cas de détention directe, la doctrine administrative considère que les dépenses de travaux sont déductibles des revenus de celui qui en a effectivement supporté la charge.

Pour le nu-propriétaire, la déduction est pratiquée sur les revenus fonciers provenant de ses autres propriétés. Ainsi, sous réserve que l’immeuble soit loué, le nu-propriétaire peut donc déduire non seulement les dépenses de grosses réparations (dont le paiement lui incombe en application de l’article 605 du Code civil) mais également les dépenses d’entretien et de réparation payées à la place de l’usufruitier.

En cas de détention par l’intermédiaire d’une société de personnes, les dépenses de travaux étant prises en charge par la société, la question de leur déduction des revenus du nu-propriétaire ne se pose pas.
 

A rapprocher : Rescrit n° 2007/53 (FP) du 11 décembre 2007

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