Interdiction d’utiliser les couleurs liées aux signes distinctifs d’un réseau : engagement perpétuel ?

Photo de profil - ZANETTE Alissia | Avocat | Lettre des réseaux

ZANETTE Alissia

Avocat

CA Colmar, 3 juin 2015, RG n°14/03031

La clause contractuelle imposant à l’ancien membre du réseau de ne plus utiliser les couleurs distinctives de l’enseigne produit ses effets au jour de la cessation du contrat ; il s’agit d’une obligation ponctuelle et non-perpétuelle.

Après la cessation de son contrat de franchise « Eléphant bleu », un ancien franchisé avait l’obligation, prévue audit contrat, de ne plus utiliser les signes distinctifs du réseau et de ce fait de repeindre notamment sa station de lavage automobile avec d’autres couleurs que le bleu et blanc (dont on sait qu’elles rappellent l’enseigne de lavage).

L’ancien franchisé ne respectant pas son engagement post-contractuel, le franchiseur a été contraint d’engager une première action aux fins de forcer le fautif à modifier l’aspect extérieur de la façade de sa station de lavage, puis, une seconde action (notre affaire) dans l’objectif d’obtenir réparation du préjudice subi par l’utilisation des signes distinctifs pendant la période post-contractuelle.

Les premiers juges ont rejeté les demandes indemnitaires du franchiseur. Pour autant, la Cour d’appel de Colmar a infirmé le premier jugement et condamné l’ancien franchisé au paiement de la somme de 50.000 euros.

De son côté, l’ancien franchisé soutenait que l’interdiction qui lui était faite de ne plus utiliser les couleurs bleu et blanche après la cessation de son contrat devait être analysée comme constituant une obligation perpétuelle, et en cela une obligation prohibée. Comme exemple d’engagement perpétuel prohibé on peut citer le cas du peintre qui donne mandat illimité à un marchand pour vendre ses tableaux (Cass. 1ère civ., 5 mars 1968). La Cour n’a pas suivi cette argumentation en retenant au contraire que l’obligation d’enlever les signes distinctifs d’un réseau quitté constitue une obligation ponctuelle découlant de la rupture du contrat de franchise. La distinction est ténue mais finalement évidente : la clause en cause stipulait que l’ancien membre du réseau avait l’obligation de repeindre, sous 6 mois à compter de la cessation du contrat, son centre dans d’autres couleurs que le bleu et le blanc propres à l’enseigne ; l’ancien franchisé n’avait à exécuter son obligation qu’une seule et unique fois à la différence du peintre qui devait ad vitam aeternam solliciter le même marchand d’art à chaque opération de vente de ses œuvres.

Outre cette décision logique des juges d’appel, il faut retenir que la rédaction des clauses encadrant la phase post-contractuelle, dont les effets ne sont pas limités dans le temps, doit être réalisée avec attention et soin de façon à éviter une contestation fondée sur l’interdiction de perpétuité.

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