Résiliation du bail commercial portant sur des locaux en partie édifiés sur le terrain d’un tiers

Cass. civ. 3ème, 2 mars 2017, n°15-25.136

En vertu de l’article 1719 du Code civil, le bailleur doit garantir au preneur la jouissance paisible des locaux loués pendant la durée du bail.

Ce qu’il faut retenir : En vertu de l’article 1719 du Code civil, le bailleur doit garantir au preneur la jouissance paisible des locaux loués pendant la durée du bail.

Dans le cas de locaux commerciaux pour partie édifiés sur le terrain d’autrui (terrain appartenant à EDF), la Cour estime que même si le bailleur est titulaire d’une convention d’occupation temporaire sur celui-ci, l’exploitation de la partie des locaux commerciaux construits sur ce terrain est soumise au bon vouloir d’un tiers disposant de droits incontestables de nature à contredire ceux conférés par le bailleur au preneur, dès lors la résiliation du bail commercial doit être confirmée.

En outre, la Cour juge que le préjudice du preneur, certes futur, n’en est pas moins certain et qu’il est bien fondé à en demander réparation au bailleur sous forme de dommages et intérêts.
 

Pour approfondir : Le propriétaire d’un local commercial donne à bail commercial ce dernier pour l’exploitation d’une activité de restauration.

Une partie des locaux loués ayant été édifiés sur un terrain appartenant à la société EDF, le bailleur est contraint de conclure avec le propriétaire voisin, EDF, une convention d’occupation du domaine public le 20 novembre 2007. Le preneur assigne alors le bailleur en résiliation du bail commercial et en paiement de dommages et intérêts. La Cour d’appel jugeant que le bailleur a manqué à son obligation relative à la jouissance paisible du preneur fait droit à ses demandes.

Le bailleur forme alors un pourvoi en cassation. Il prétend que s’il doit assurer la jouissance paisible des locaux loués, son obligation de délivrance ne concernerait que les conditions d’exploitation des locaux, devant correspondre à la destination prévue par le bail, en l’espèce l’activité de restauration.

Le simple fait qu’EDF ait la faculté de revendiquer une partie des locaux loués n’affecterait pas selon lui la jouissance du preneur.

La garantie d’éviction de l’article 1719 du Code civil ne serait due qu’en cas d’éviction réelle du preneur et pas en cas de simple risque d’éviction.

Pour finir, sur la question de la réparation du préjudice, le bailleur argue que le préjudice seulement éventuel ne donne pas lieu à indemnisation.

Par conséquent, selon lui, la décision de la société EDF de demander la restitution du bien loué étant seulement éventuelle, il n’y aurait pas lieu d’indemniser un quelconque préjudice du preneur.

Le simple risque d’éviction du preneur à bail commercial dû à l’existence d’une convention d’occupation temporaire du domaine public sur le terrain d’assiette des locaux loués suffit-il à caractériser un manquement du bailleur à l’article 1719 du Code civil ?

La Cour de cassation rejette le pourvoi du bailleur et juge que les locaux loués, pour partie construits sur le terrain d’autrui – EDF –, avaient été délivrés aux preneurs successifs sans modification conventionnelle et que si le bailleur avait été, par une convention d’occupation temporaire, autorisé personnellement à occuper ce terrain, EDF se réservait le droit d’y mettre fin, à tout moment, sans préavis ni indemnité, ce dont il résultait que l’exploitation d’une partie des locaux était soumise au bon vouloir d’un tiers disposant de droits incontestables de nature à contredire ceux conférés par le bailleur au preneur.

La Cour estime que le risque d’éviction du preneur est caractérisé et juge en outre que le préjudice résultant de ce que la chose louée était partiellement édifiée sur le terrain d’autrui était certain et devait être indemnisé.
 

A rapprocher : Fonds de commerce sur le domaine public : article L. 2124-32-1 du Code Général de la Propriété des Personnes Publiques issu de l’article 72 de la n°2014-626 du 18 juin 2014 dite « loi Pinel »

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