L’extinction d’une sûreté consécutive à une décision de rejet de créance du juge-commissaire

Cass. com., 4 mai 2017, n°15-24.854

La décision de rejet de créance prononcée par le juge-commissaire emporte systématiquement extinction des sûretés qui la garantissent.

Ce qu’il faut retenir : La décision de rejet de créance prononcée par le juge-commissaire emporte systématiquement extinction des sûretés qui la garantissent.

Pour approfondir : Lorsqu’une procédure collective est ouverte, les créanciers sont obligés de déclarer leurs créances entre les mains du mandataire dans un délai de deux mois, à compter de la publication du jugement d’ouverture au BODACC. Le mandataire judiciaire établit alors, après avoir sollicité les observations du débiteur, la liste des créances déclarées. Il transmet cette liste au juge-commissaire. Au regard des propositions du mandataire, le juge-commissaire peut alors décider de l’admission, du rejet des créances ou constater soit qu’une instance est en cours, soit que la contestation ne relève pas de sa compétence conformément aux dispositions de l’article L.624-2 du Code de commerce.

En l’espèce, la Société Générale (la banque) a consenti à la société La Renaissance (le débiteur) un prêt garanti par un nantissement sur fonds de commerce. Par un jugement du 31 janvier 2006, le débiteur a bénéficié de l’ouverture d’une procédure de sauvegarde.

Le 3 avril 2007, le tribunal a arrêté le plan de sauvegarde de la société. Puis, par une ordonnance du 2 juin 2008, devenue irrévocable, le juge-commissaire a rejeté la déclaration de créance faite par la banque. Il l’a considérée procéduralement irrégulière. La banque a malgré tout décidé de renouveler son inscription de nantissement le 20 septembre 2011, mais le débiteur s’y est opposé.

Pour se prononcer, la Cour d’appel se fonde sur l’article L.622-26 du Code de commerce qui dispose que la créance qui n’a pas été valablement déclarée par le créancier dans le délai qui lui est imparti, n’est pas éteinte mais simplement inopposable à la procédure. Dès lors, comme la créance survit, la Cour d’appel estime, par voie d’accessoire, que les sûretés qui y sont attachées font de même. Selon elle, la banque était donc en droit de renouveler son inscription.

La Cour de cassation rejette un tel raisonnement. Elle estime que « la décision par laquelle le juge-commissaire retient qu’une créance a été irrégulièrement déclarée et ne peut être admise au passif est, au sens du texte précité, une décision de rejet de la créance, qui entraîne, par voie de conséquence, l’extinction de la sûreté qui la garantissait ».

Cette solution marque donc un retour au régime antérieur à la loi du 26 juillet 2005 (voir en ce sens Cass. com., 21 juin 2005, n°04-13.892). La Haute juridiction ne fait ici aucune distinction en fonction du motif qui a conduit le juge-commissaire à rejeter la créance. La sanction doit être l’extinction de la créance et de ses accessoires dans tous les cas. Peu importe que le juge-commissaire fonde sa décision sur un moyen tenant à la procédure de déclaration ou au fond du droit.

Cet arrêt rendu par la haute juridiction peut être critiquable car il va manifestement à l’encontre des dernières évolutions législatives. Il crée de plus une distinction entre le créancier qui ne déclare pas régulièrement sa créance à la procédure, et celui qui ne la déclare pas du tout. Le premier verra sa créance éteinte à la suite de la décision de rejet du juge commissaire et ne sera donc jamais payé. Le second, en l’absence de décision de rejet, verra simplement sa créance rendue inopposable à la procédure. Il aura donc toujours espoir d’obtenir paiement de sa créance, au terme du plan de sauvegarde. 

A rapprocher : Cass. com., 21 juin 2005, n°04-13.892

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