Qui peut agir en déchéance de marque ?

CA Paris, 23 février 2016, RG n°14/17540

Toute personne, bien que n’exploitant pas un signe, a intérêt à faire lever une entrave au lancement ou au développement de son activité économique, et est recevable à agir en déchéance d’une marque.

Ce qu’il faut retenir : Toute personne, bien que n’exploitant pas un signe, a intérêt à faire lever une entrave au lancement ou au développement de son activité économique, et est recevable à agir en déchéance d’une marque.

Pour approfondir : Une société commercialisant des produits cosmétiques et de parfumerie dans de nombreux pays, notamment en Europe et au Moyen Orient, a engagé une action en déchéance des droits sur une marque française à l’encontre d’une société ayant pour activité la création et la commercialisation de parfums et cosmétiques. Reconventionnellement, c’est la déchéance d’une marque détenue par la société qui avait engagé les hostilités procédurales qui était soulevée. L’intérêt à agir en déchéance était au cœur de l’affaire.

L’article L. 714-5 du Code de la propriété intellectuelle prévoit en effet que « tout intéressé » peut agir en déchéance, ce qui laisse entière la question de la détermination d’un intérêt à agir.

La Cour d’appel de Paris avait retenu l’irrecevabilité de la demande en déchéance aux motifs suivants « la société Kosan n’exerce aucune activité commerciale en France et ne démontre pas qu’elle a mis en œuvre de sérieux actes préparatoires lui permettant de soutenir qu’elle a l’intention de développer sa dénomination FLOR MAR dans un avenir proche sur le territoire français ».

La Cour de cassation a cassé cet arrêt (Cass. com., 24 juin 2014, pourvoi n°13-16.374) considérant : « qu’en statuant ainsi, alors que le constat de l’identité de l’activité commerciale exercée par les deux sociétés et de leur situation de concurrence suffisait à caractériser l’intérêt de la société Kosan à agir en déchéance des droits de la société Camiflor sur sa marque, laquelle constituait une entrave à l’exploitation, en France, de son activité économique ».

L’arrêt commenté statue sur renvoi après cassation et va suivre la ligne directrice de la Cour de cassation dans son arrêt en jugeant « que l’intérêt de la société Kosan à voir lever l’entrave à une exploitation de son activité économique en France est légitime » : à cette fin, les juges d’appel constatent que les sociétés exercent une activité commerciale similaire  dans un domaine identique – produits visés à l’enregistrement de la marque litigieuse -, qu’elles sont directement en concurrence sur différents marchés européens et mondiaux et que si la société Kosan n’a pas d’activité en France au jour de la demande de déchéance, il n’en reste pas moins qu’ayant vocation à étendre géographiquement cette activité, et notamment en France, la marque française de la société Camiflor constitue bien pour elle une entrave à l’exploitation de son activité économique en France, de sorte que son intérêt à agir est établi. Aussi, toute personne, bien que n’exploitant pas un signe, ayant intérêt à faire lever une entrave au lancement ou au développement de son activité économique, sera jugée recevable à agir en déchéance.

A rapprocher : article L.714-5 du Code de la propriété intellectuelle

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