Compétence de la Cour d’appel de Paris et pratiques anticoncurrentielles

Cass. com., 10 juillet 2018, n°17-16.365

Il résulte de la combinaison des articles L.420-7 et R.420-5 du code de commerce que seule la Cour d’appel de Paris a compétence pour statuer sur l’appel formé contre les décisions rendues par les juridictions spécialisées désignées à l’article R.420-3 relatif aux pratiques anticoncurrentielles. L’inobservation de ces règles est sanctionnée par une fin de non-recevoir qui doit être soulevée d’office.

La Cour de cassation, en formation de section, a rendu un arrêt du 10 juillet 2018 destiné à la publication au Bulletin mensuel et au Bulletin bimensuel d’information de la Cour de cassation, par lequel elle réaffirme la compétence de la Cour d’appel de Paris en matière de pratiques anticoncurrentielles.

Il résulte de l’article L.420-7 du code de commerce que les litiges relatifs à l’application des dispositions des articles L.420-1 à L.420-5 du code de commerce, c’est-à-dire en matière de pratiques anticoncurrentielles, relèvent de la compétence exclusive de juridictions spécialisées, désignées par décret et aux articles R.420-3 et suivants.

L’article R.420-5 du code de commerce désigne la Cour d’appel de Paris comme la seule Cour d’appel compétente pour connaitre des décisions rendues par les juridictions spécialisées.

C’est au visa des deux articles susvisés (article L.420-7 et R.420-5 du code de commerce) que la Cour de cassation réaffirme ces principes.

En l’espèce, la société F., assurant la distribution de films en Martinique, et la société C., sous-distributeur en Guadeloupe, se sont vues sanctionnées par le Conseil de la concurrence, pour avoir enfreint les dispositions de l’article L.420-2 du code de commerce.

La décision du Conseil de la concurrence a ensuite été réformée par la Cour d’appel de Paris, retenant notamment qu’il n’était pas établi que la société C. ait enfreint l’article L. 420-2 du code de commerce.

M. C., exploitant d’une salle de cinéma, a assigné les sociétés F. et C. en réparation des préjudices subis du fait de ces pratiques anticoncurrentielles devant le tribunal mixte de commerce de Fort de France.

Ce dernier a déclaré prescrite l’action de M. C, lequel a en conséquence interjeté appel devant la Cour d’appel de Fort de France, qui a confirmé le jugement rendu par le Tribunal mixte de commerce de Fort de France le 30 juin 2015.

La Haute cour casse et annule, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Fort de France le 24 janvier 2017, et déclare irrecevable l’appel formé par M. C. devant la Cour d’appel de Fort de France.

La Cour énonce que le jugement de première instance ayant été rendu par une juridiction spécialement désignée par l’article R. 420-3 du code de commerce, la Cour d’appel de Fort de France aurait dû relever d’office la fin de non-recevoir tirée de son défaut de pouvoir juridictionnel pour statuer sur l’appel formé devant elle.

Ainsi la Cour de cassation réaffirme la compétence exclusive de la cour d’appel de Paris pour statuer sur l’appel formé contre les décisions rendues par les juridictions spécialisées désignées à l’article R.420-3 du code de commerce (pour connaître des actions en réparation des préjudices nés de pratiques anticoncurrentielles), et précise la sanction de l’inobservation de cette règle d’ordre public consistant en une fin de non-recevoir.

Cette solution fait écho à celle retenue en matière de pratiques restrictives de concurrence, la loi prévoyant une règle de compétence exclusive et dérogatoire du droit commun, pour statuer sur les pratiques commerciales restrictives de concurrence sanctionnées par l’article L.442-6 du code de commerce.

Le présent arrêt est toutefois intéressant en ce qu’il permet à la Cour de cassation de prononcer pour la première fois la solution à propos de l’article L.420-7 du code de commerce relatif aux pratiques anticoncurrentielles.

A rapprocher :  Cass. com., 21 mars 2018, n°16-28.412

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