Droit de la publicité et promotion des ventes – Cass. com., 14 février 2012, pourvoi n°10-19.330

TOUSSAINT-DAVID Gaëlle

Avocat

Toute société faisant la publicité d’un produit doit préciser les caractéristiques principales et le prix des produits présentés dans les tracts publicitaires diffusés, sous peine de voir la publicité qualifiée de trompeuse.

On le sait, l’article L. 121-1 du Code de la consommation énonce les hypothèses dans lesquelles une pratique commerciale est trompeuse.

Selon le II de ce texte :

« une pratique commerciale est également trompeuse si, compte tenu des limites propres au moyen de communication utilisé et des circonstances qui l’entourent, elle omet, dissimule ou fournit de façon inintelligible, ambiguë ou à contretemps une information substantielle ou lorsqu’elle n’indique pas sa véritable intention commerciale dès lors que celle-ci ne ressort pas déjà du contexte ».

Sous le vocable « d’information substantielle », on retrouve notamment les caractéristiques principales du bien ou du service, ou encore le prix TTC.

Dans l’espèce commentée, étaient au cœur du litige les agissements d’une société allemande commercialisant des meubles de cuisine dans différents points de vente en France et y faisant distribuer des tracts publicitaires.

Le Syndicat national de l’équipement de la cuisine (le SNEC) assigne ladite société en justice afin de faire constater que ces documents publicitaires ne respectent pas la réglementation française et d’ordonner en conséquence la cessation de leur diffusion en France.

Lesdits tracts publicitaires étaient considérés litigieux dès lors qu’ils démontraient une absence de clarté portant sur les caractéristiques principales et le prix final du produit, privant ainsi le consommateur d’une information substantielle dont il aurait besoin pour prendre en l’état une décision commerciale.

Ainsi, à titre d’exemple, les documents publicitaires en cause n’énuméraient pas les objets livrés pour le prix ou encore ne mentionnaient pas les matières, essences ou matériaux composant les meubles de cuisine.

La Cour d’appel de Colmar, le 27 octobre 2009, avait donné raison au Syndicat, condamnant ainsi la société allemande à la cessation de la diffusion des documents publicitaires non conformes au principe de clarté de la publicité.

Pour motiver cette décision, la Cour avait retenu que de tels documents constituaient un trouble manifestement illicite, au regard du décret du 14 mars 1986 et de la directive européenne du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales.

Cette directive répute trompeuses certaines omissions lorsqu’elles portent sur les caractéristiques principales du produit et sur le prix final et condamne les imprécisions et les ambiguïtés dans les tracts publicitaires.

En l’espèce, l’article 4 du décret de 1986 selon lequel « Si le prix de vente mentionné sur l’étiquette ou sur les documents commerciaux ou publicitaires couvre un ensemble d’objets d’ameublement pouvant être vendus séparément, il doit être complété par la désignation et le prix de chacun des objets composant cet ensemble », en conformité avec la directive européenne, imposait de donner un prix à un lave-vaisselle pouvant être inséré dans les ensembles de cuisine présentés sur les tracts au lieu d’une information énonçant « un faible supplément au prix indiqué ».

La société défenderesse avait formé un pourvoi en cassation, faisant valoir que :

– le décret du 14 mars 1986 n’était pas applicable à la situation en cause dès lors que les cuisines ne devaient pas être considérées comme objets d’ameublement ;

– que l’absence de précisions des produits sur les publicités ne constituait pas un trouble manifestement illicite et ne devait pas être le seul élément à prendre en compte pour interdire la diffusion d’une telle publicité, considérée comme pratique commerciale déloyale.

La Chambre commerciale rejette le pourvoi ainsi formé contre l’arrêt rendu le 27 octobre 2009 par la Cour d’appel de Colmar.

Autrement dit, toute société faisant la publicité d’un produit est dans l’obligation de préciser les caractéristiques principales du produit et le prix des produits présentés dans les tracts publicitaires diffusés, sous peine de voir la publicité qualifiée de trompeuse et de se voir interdire sa diffusion sur le marché français.


Sommaire

Autres articles

some
La résiliation en trois clics c’est désormais possible !
La résiliation en trois clics c’est désormais possible ! Ce qu’il faut retenir : Afin de respecter les exigences de la réglementation relative à la résiliation en trois clics et ainsi, éviter toute sanction à ce titre, vous devez notamment :…
some
Le cumul des sanctions administratives validé par le Conseil constitutionnel
Cons. const., décision n°2021-984 QPC, 25 mars 2022 Le Conseil constitutionnel déclare conformes à la Constitution les dispositions de l’article L. 470-2 VII du Code de commerce relatif au cumul de sanctions administratives relevant de pratiques anticoncurrentielles. Partant, une même…
some
Clause de non-concurrence et justification du savoir-faire du franchiseur
CA Paris, Pôle 5, Chambre 4, 30 mars 2022, n°20/08551 La Cour d’appel de Paris est venue préciser la jurisprudence antérieure relative à l’application d’une clause de non-concurrence au sein d’un contrat de franchise. Elle a considéré que la clause…
some
Validité de l’acte de cautionnement comportant des termes non prévus par la loi
Cass. com., 21 avril 2022, n°20-23.300 Le fait que la mention manuscrite apposée sur l’acte de cautionnement comporte des termes non prescrits par l’article L.341-2 du Code de la consommation dans son ancienne rédaction n’affecte aucunement de manière automatique la…
some
Le règlement d’exemption, quel impact pour les réseaux ?
Retrouvez François-Luc Simon dans le podcast "Le Talk Franchise" lors de Franchise Expo Paris.
some
Rupture brutale et reprise d’activité par un tiers : de nouvelles précisions
La partie qui s’estime victime d’une rupture brutale des relations commerciales établies ne peut se prévaloir de la relation qu’elle avait nouée antérieurement à un plan de cession, sauf à démontrer l’intention du tiers cessionnaire de poursuivre les...