Cass. civ. 3ème, 6 mai 2015, pourvoi n°13-24.947
La clause contenue dans un contrat de construction de maison individuelle assimilant la prise de possession à la réception est nulle.
Le contrat de construction de maison individuelle est particulièrement réglementé et protecteur des particuliers.
Notamment, le paiement du prix de la construction doit répondre aux exigences fixées par les articles R.231-7 et suivants du Code de la construction et de l’habitation. La législation impose ainsi un paiement échelonné du marché en fonction de l’avancement des travaux. Il s’ensuit que le paiement du solde n’est pas dû au même moment selon que le maître de l’ouvrage se fait assister ou non par un professionnel lors de la réception de la maison :
– dans l’hypothèse première où le maître de l’ouvrage est assisté par un professionnel lors de la réception, le paiement du solde a lieu, soit à l’issue de la réception si aucune réserve n’a été formulée, soit à la levée des réserves s’il en a été formulées ;
– dans l’hypothèse seconde où le maître de l’ouvrage n’est pas assisté par un professionnel lors de la réception, le paiement du solde se fera alors soit dans les huit jours qui suivent la remise des clés consécutive à la réception si aucune réserve n’a été formulée, soit à la levée des réserves s’il en a été formulées.
Au cas d’espèce, une société a conclu un contrat de construction de maison individuelle avec le maître d’ouvrage non professionnel. Afin de s’affranchir de la législation contraignante susvisée et rendre immédiatement exigibles les sommes dues au jour de la prise de possession de l’ouvrage, la société de construction avait inséré une clause au sein du contrat prévoyant que « toute prise de possession ou emménagement avant la rédaction d’un procès-verbal de réception signé par le maître de l’ouvrage et le maître de l’œuvre, entraîne de fait la réception de la maison sans réserve et l’exigibilité de l’intégralité des sommes restant dues, sans contestation possible ».
La Cour de cassation a confirmé l’arrêt de la Cour d’appel qui a retenu que la clause prévoyant que la prise de possession équivalait à une réception tacite devait être réputée non écrite.
En effet, l’insertion d’une telle clause dans un contrat conclu entre un professionnel et un particulier est de nature à créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties. Or, l’on sait que l’équilibre contractuel, dont on rappellera qu’il s’apprécie dans la globalité du contrat et non clause par clause, est férocement défendu par la législation française de sorte que cette décision de la Haute Cour ne surprend pas.