Entretien avec Me Jean-Charles SIMON

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SIMON Jean-Charles

Avocat Associé-Gérant

Interview recueillie par Informations Entreprise, n°152, avril/juin 2014

Dans cet interview, Jean-Charles SIMON explique en quoi et pourquoi les entreprises françaises se révèlent frileuses à l’idée d’exporter tout en apportant des idées sur ce qu’il conviendrait de faire.

IE : Quels sont les pays pouvant être considérés comme un levier pour l’export des entreprises françaises ?

JCS : L’organisation économique mondiale s’organise essentiellement entre les Etats-Unis, le Japon, la Chine, l’Europe (Allemagne, France, Italie), la Russie, le Moyen-Orient, l’Amérique du sud et, sans doute, l’Afrique à moyen terme. En France, la Direction des entreprises et de l’économie internationale retient sept pays clés : Algérie, Chine, Émirats arabes unis, Japon, Inde, Mexique, Russie. Même si cette analyse n’est pas étrangère à une position plus politique cette approche est intéressante. En réalité, tout dépend de la nature de l’activité, des moyens que l’entreprise est prête à engager, de son adaptabilité à des clés du succès. Il faut également penser aux opportunités croisées notamment entre la France, les Etats Unis, la Chine, le Japon, le Moyen-Orient, le Brésil et l’Afrique. Il faut sans doute favoriser également des pays où les structures d’accueil sont les plus abouties. Il n’en reste pas moins que seulement 30 % des ETI et 10 % des PME françaises exportent.

 

IE : Quelles sont les clés du succès à l’export selon vous ?

JCS : Il n’existe pas de « recette » mais quelques idées. Tout d’abord, le développement international se vit en « mode projet » au sein de l’entreprise, c’est-à-dire dans le cadre d’une réflexion d’ensemble, en équipe organisée. La première des questions est d’ailleurs de savoir pourquoi aller à l’international et il ne faut pas confondre croissance, expansion ou internationalisation. Une des clés du succès repose sur l’adaptation des produits au marché et aux mentalités pour répondre aux attentes des consommateurs. Ensuite, au même plan, le facteur humain est essentiel. D’une part, il faut s’entourer de ceux qui seront le plus à même de porter le projet parce qu’ils ont la compétence et partagent la culture de l’entreprise. Le couple français/local est souvent utile. D’autre part, le chef d’entreprise doit être prêt à sacrifier de son temps et donc s’investir personnellement. Il doit mesurer la capacité d’’adaptabilité de l’entreprise dans le pays dont il doit intégrer à la fois les mentalités, les modes de fonctionnement, les us et coutumes et le comportement du consommateur cible. In fine, les clés du succès reposent ainsi sur l’adaptation du couple produit/marché. 

 

IE : Vous évoquez la mentalité des entrepreneurs français. Pouvez-vous l’expliquer ?

JCS : Je constate que l’entrepreneur français, franc comme l’étaient nos ancêtres, un peu gaulois, qui galvanise et transporte, peut être perçu parfois comme arrogant. La transformation nécessaire à l’étranger de l’état d’esprit d’une entreprise vient surtout de la mentalité et de l’expérience de ses hommes qui doivent s’adapter en toutes circonstances.

 

IE : On parle beaucoup de la Chine actuellement. Mais s’agit-il d’un réel sésame pour l’export ?

JCS : La Chine tire la croissance du Monde. Avec l’accroissement de son marché intérieur, une organisation plus structurée et professionnelle de ses échanges, elle va se maintenir pendant longtemps comme le moteur de l’économie mondiale. Mais la Chine est aussi consciente de ses erreurs de « jeunesse » et elle s’adapte très vite. En Europe, la Chine vient de confirmer son souhait d’investir à l’Ouest, notamment en France, mais elle montre aussi sa volonté d’aller à l’Est (Roumanie, Pologne, etc). L’année 2014 est celle du cinquantenaire des relations franco-chinoises. De nombreuses manifestations vont se tenir. C’est l’opportunité de découvrir la Chine pour les entrepreneurs qui ne la connaissent pas. La Chine présente de réelles opportunités sur son territoire ou en France pour les entrepreneurs. Y exporter aujourd’hui signifie avoir la volonté de conquérir le marché intérieur. Je ne crois plus à une exportation dictée par la production à bas coût. L’entreprise devra s’adapter aux mentalités qui bougent. En Chine, le chef d’entreprise parle assez peu. Il montre l’exemple à suivre dans son comportement et non dans ses mots. Notre Cabinet est présent en Chine depuis trois ans. Nous avons conclu une alliance forte avec le cabinet ZHONG YIN LAWYERS. Nous accompagnons ainsi les entreprises françaises qui souhaitent s’implanter en Chine et les entreprises chinoises qui désirent investir en France.

 

IE : On entend également beaucoup parler d’autres pays émergents comme l’Inde et certains pays d’Asie. Ces supposés eldorados tiennent-ils leurs promesses ?

JCS : Je ne crois pas beaucoup aux eldorados. Certaines régions du Monde sont peut-être plus favorables que d’autres mais je crois avant tout au travail et à la volonté des entrepreneurs. L’Inde me semble un pays difficile. Il se dit que plusieurs pays d’Asie sont prometteurs, le Vietnam, le Myanmar, l’Indonésie par exemple. Tout dépend de ce que l’on souhaite y faire et de ce que l’on en attend.

 

IE : Comment jugez-vous la politique d’export menée par les pouvoirs publics ?

JCS : Je pense qu’il ne faut pas tout attendre des pouvoirs publics. L’Etat miracle n’existe plus. Il n’a d’ailleurs probablement jamais existé. Certes, les aides et subventions peuvent être utiles mais elles sont nécessairement limitées dans le contexte économique que nous connaissons. Peut-être faudrait-il davantage s’orienter vers des réductions de charges significatives pour les entreprises qui investissent à l’export ? Sur le terrain, les services de l’Etat se battent et font un travail difficile dans un contexte économique de rigueur qui rend l’investissement compliqué. Il faut leur donner davantage de moyens en regroupant les compétences. Je crois que la réflexion est d’ailleurs lancée.

 

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