La renonciation à un droit n’implique pas l’existence de concessions réciproques

Cass. civ. 2ème, 2 février 2017, n°16-13.521

La renonciation à un droit n’est pas soumise aux mêmes conditions que la transaction : aucune concession réciproque n’est nécessaire pour que l’effet extinctif pour le droit abdiqué ne soit reconnu dans le cadre d’une renonciation.

Ce qu’il faut retenir : La renonciation à un droit n’est pas soumise aux mêmes conditions que la transaction : aucune concession réciproque n’est nécessaire pour que l’effet extinctif pour le droit abdiqué ne soit reconnu dans le cadre d’une renonciation.


Pour approfondir : 
Une société civile immobilière, la SCI Antago, est propriétaire d’un ensemble immobilier qu’elle a fait assurer contre l’incendie par la société Areas Dommages par l’intermédiaire d’un courtier en assurances, la société Rabner.

Le 2 septembre 2011, un incendie a détruit cet immeuble. Le 6 décembre 2011, la SCI Antago a accepté la proposition d’indemnisation de la société Areas Dommages à hauteur de 963.526 euros.

Le 24 janvier 2012, la SCI Antago a signé une quittance subrogative aux termes de laquelle celle-ci « déclare Areas Dommages quitte et déchargé de toute obligation consécutive à ce sinistre. ».

L’indemnité proposée tenait compte d’une limite contractuelle de garantie.

La SCI Antago s’est alors retournée contre l’assureur et le courtier en vue de l’indemnisation de son préjudice consistant en la perte de chance de souscrire un contrat sans limitation de garantie.

Dans un arrêt du 11 janvier 2016, la Cour d’appel de Nancy a considéré que :

« Attendu que la société Areas Dommages se prévaut cependant de la ‘lettre d’acceptation’ du 6 décembre 2011 par laquelle la société Antago a accepté la proposition d’indemnisation à concurrence de 963 526 euros et de la quittance subrogative du 24 janvier 2012 dans laquelle celle-ci ‘déclare Areas dommages quitte et déchargé de toute obligation consécutive à ce sinistre…’ ;

Mais attendu que ces actes, qui ne prévoient aucune concession de la part de la société Areas Dommages, ne constituent pas une transaction et n’entraînent donc pas renonciation de la société Antago à toute contestation ultérieure relative au paiement d’une indemnité supplémentaire ;

Attendu que faute de pouvoir justifier de l’entrée de la limitation de garantie dans le champ contractuel, la société Areas Dommages doit être condamnée à indemniser la société Antago de l’intégralité du préjudice causé par le sinistre litigieux, soit les sommes suivantes totalisant 542 451 euros ».

La Cour d’appel de Nancy a ainsi considéré que l’assureur ne peut se prévaloir d’une renonciation à un droit de la part de la SCI Antago dans la mesure où aucune concession réciproque n’existait.

La Cour de cassation censure cet arrêt en rappelant que renonciation et transaction sont deux notions distinctes :

« Vu l’article 1234 ancien du Code civil ; Attendu que pour dire que l’assureur ne peut invoquer une renonciation de la SCI à se prévaloir à son égard de l’inopposabilité de la clause de limitation de garantie, l’arrêt retient qu’il se prévaut de la « lettre d’acceptation » du 6 décembre 2011 par laquelle la SCI a accepté la proposition d’indemnisation à concurrence de 963 526 euros et de la quittance subrogative du 24 janvier 2012 dans laquelle celle-ci « déclare Areas Dommages quitte et déchargé de toute obligation consécutive à ce sinistre », mais que ces actes, qui ne prévoient aucune concession de sa part, ne constituent pas une transaction et n’entraînent donc pas renonciation de la SCI à toute contestation ultérieure au paiement d’une indemnité supplémentaire ; Qu’en statuant ainsi, alors que la renonciation à un droit est un acte unilatéral qui n’exige pas l’existence de concessions réciproques, la Cour d’appel a violé les textes susvisés ».

La Cour de cassation rappelle le caractère unilatéral de la renonciation qui, à l’inverse de la transaction, ne requiert aucune concession réciproque.
 

A rapprocher : CA Nancy, 11 janvier 2016, 14/02474

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