Etude prévisionnelle irréaliste et trompeuse – CA Caen, 20 juin 2013, RG n°12/01823

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SIMON François-Luc

Avocat Associé-Gérant - Docteur en droit

Cette décision revient sur la mise en jeu de la responsabilité en raison de la fourniture d’une étude prévisionnelle irréaliste et trompeuse.

La question de la remise d’une étude prévisionnelle irréaliste et trompeuse alimente de nouveau la jurisprudence.

Dans cette affaire, la société R. a consenti à la société P. un contrat de licence de marque portant sur l’exploitation de la marque « Bleu Minute ». L’article L. 330-3 du code de commerce encadrant le devoir d’information précontractuelle du concédant étant applicable uniquement lorsque l’engagement souscrit par le licencié comporte une obligation d’exclusivité ou de quasi-exclusivité, ce qui n’était pas le cas en l’espèce, le non-respect de cette disposition ne pouvait être invoqué par le licencié. Pour autant, il devait néanmoins être en mesure de s’engager en donnant un consentement libre, éclairé et exempt de tout vice.

La société R. a remis à la société P. une étude comportant des perspectives de chiffres d’affaires qui ne se sont pas réalisées, sans que les juges du fond fassent droit aux arguments avancés par le concédant.

Au cours des trois premiers exercices, le licencié avait réalisé un chiffre d’affaires de l’ordre de la moitié de ceux avancés en son temps par la société R., tandis que les résultats d’exploitation étaient quasi-inexistants. Ce faisant, le licencié soulevait la nullité du contrat de licence de marque pour dol.

Conformément à l’article 1304 du Code civil, le délai de prescription d’une telle action ne commence à courir qu’à compter du jour où le vice a été découvert soit, en l’espèce, lors de l’établissement des comptes annuels du premier exercice ; l’action n’était donc pas prescrite lorsque la nullité du contrat avait été soulevée.

Le concédant tentait – en vain – de souligner que les chiffres d’affaires d’une entreprise dépendent des aptitudes commerciales et qualités relationnelles du dirigeant ; le licencié parvenait à justifier de sa bonne gestion, au regard notamment de sa maitrise des charges de l’entreprise.

Il en ressortait, selon les juges du fond, que le concédant, professionnel spécialiste de l’implantation de serrurerie et cordonnerie dans des centres commerciaux, ne pouvait ignorer, au regard de l’environnement économique et de la localisation géographique du licencié, que les perspectives de chiffres d’affaires mentionnées dans l’étude qu’il remettait à son partenaire, étaient irréalistes et l’avaient trompé dans son appréciation de l’opportunité au plan économique de l’opération envisagée.


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