Le contrat de location-gérance

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SIMON François-Luc

Avocat Associé-Gérant - Docteur en droit

Aspects pratiques et stratégiques

Le contrat de location-gérance est un contrat fréquemment utilisé, bénéficiant d’un régime juridique stable et déterminé, stratégiquement utile dans le cadre de certains modes de développement : Interview de François-Luc SIMON en 12 questions

Le contrat de location-gérance est un contrat fréquemment utilisé, bénéficiant d’un régime juridique stable et déterminé, stratégiquement utile dans le cadre de certains modes de développement des réseaux de distribution : Interview de François-Luc SIMON en 12 questions

Question n°1 : Quelles sont les conditions légalement requises pour donner un fonds de commerce en location-gérance ?

FLS : Le contrat de location-gérance est une convention par laquelle le fonds de commerce est loué par son propriétaire à un locataire, le locataire-gérant, qui l’exploitera à ses risques et périls moyennant le versement d’une redevance. La location-gérance est régie par les articles L.144-1 et suivants du code de commerce.

Ce contrat ne peut être conclu que si le bailleur a exploité personnellement le fonds pendant deux ans au moins ; il existe toutefois des exceptions et la possibilité de demander une réduction de ce délai. En effet, l’article L.144-3 du code de commerce impose en principe que « les personnes physiques ou morales qui concèdent une location-gérance doivent avoir exploité pendant deux années au moins le fonds ou l’établissement artisanal mis en gérance » ; à défaut de satisfaire à cette prescription d’ordre public, le contrat de locataire-gérance encourt la nullité en application de l’article L. 144-10 du code de commerce. La règle fixée par l’article L. 144-3 du code de commerce souffre cependant un certain nombre d’exceptions, à savoir notamment :

–    une exception résulte de l’article L. 144-4 du code de commerce, selon lequel le délai de 2 ans « peut être supprimé ou réduit par ordonnance du président du tribunal de grande instance rendue sur simple requête de l’intéressé, le ministère public entendu, notamment lorsque celui-ci justifie qu’il est dans l’impossibilité d’exploiter son fonds personnellement ou par l’intermédiaire de préposés » ; ce procédé est assez couramment utilisé par des enseignes d’envergure nationale lorsqu’elles mettent en location-gérance un fonds de commerce de façon quasi-concomitante à sa création ;

–    la seconde exception résulte du 8° de l’article L. 144-5 du code de commerce, qui dispense le loueur du fonds de commerce de l’avoir lui-même préalablement exploité pendant 2 ans « lorsque la locataire-gérance a pour objet principal d’assurer, sous contrat d’exclusivité, l’écoulement au détail des produits fabriqués ou distribués par lui-même ». Cette exonération de plein droit ne joue en principe que si la société propriétaire du fonds de commerce consent elle-même à la société locataire-gérant un contrat d’approvisionnement exclusif. L’analyse de la jurisprudence admet toutefois que l’exonération en cause puisse jouer dès lors que (CA Toulouse 9 novembre 2006, Sarl Ampère Distribution, n° 05/03767) :

o    le contrat de location-gérance prévoit une clause spécifique stipulant qu’il a pour objet principal d’assurer, sous contrat d’exclusivité, l’écoulement au détail de produits distribués soit par le loueur du fonds de commerce soit par les sociétés de son groupe,
o    la société propriétaire du fonds de commerce a bien pour objet social d’assurer la distribution des produits fournis au locataire gérant,
o    l’approvisionnement du locataire-gérant par des sociétés du groupe de la société propriétaire du fonds est assuré dans le cadre d’une convention conclue entre le propriétaire du fonds et la société fournisseur (et non pas entre le locataire-gérant et la société fournisseur).

Le contrat doit être publié dans un journal d’annonces légales et, s’il n’est pas déjà commerçant, le preneur doit solliciter son inscription au RCS.

Question n°2 : Quels sont les avantages et les risques du contrat de location-gérance ?

FLS : Ce contrat permet au bailleur de conserver la propriété de son fonds de commerce et de percevoir des redevances fixes ou assises sur le chiffre d’affaires. Quant au preneur, il a l’occasion de démarrer une activité avec une clientèle déjà existante et sans disposer de fonds personnels importants, puisqu’il ne doit pas faire l’acquisition d’un fonds de commerce. Les parties sont indépendantes : le locataire-gérant exploite le fonds de commerce à ses risques et périls.

Mais ce contrat n’est pas sans dangers ; en effet, le bailleur reste solidaire pendant 6 mois suivant la publication du contrat des dettes du fonds de commerce et demeure solidaire sans limitation de durée du paiement des impôts directs, ce qui explique qu’un dépôt de garantie soit souvent exigé. En outre, à l’issue du contrat, il reprend le fonds dans l’état où il se trouve et il n’est pas exclu que la valeur de celui-ci ait été dévaluée ; à l’inverse, si le fonds de commerce a pris une plus-value, le bailleur qui en bénéficie.

Question n°3 : Quelles sont les différentes précautions préalables à prendre ?

FLS : Comme toujours, chaque situation doit être précisément analysée, au cas par cas. Au plan opérationnel, seul l’emplacement et sa situation dans la zone de chalandise comptent. Au plan juridique, durant la période de négociation, les parties optent pour les (nombreuses) modalités accompagnant le contrat de location-gérance, les articles L.144-1 et suivants du code de commerce laissant une marge de liberté importante aux parties. En tout état de cause, celles-ci doivent s’assurer que le bail commercial ne fait pas obstacle à la location-gérance ; il convient également de vérifier les contrats de travail en cours car le preneur doit les poursuivre, tout comme le bailleur doit les reprendre à l’issue du contrat.

Question n°4 : Le locataire gérant doit-il verser un dépôt de garantie ?

FLS : Au plan juridique, le dépôt de garantie n’est pas indispensable ; un contrat de location-gérance demeure évidemment valable en l’absence de dépôt de garantie.

Néanmoins, au plan pratique, un dépôt de garantie est généralement exigé par le propriétaire du fonds de commerce. Pour assurer l’exécution des charges et conditions du contrat de location-gérance, et notamment du paiement de la redevance, des accessoires, et en général de toutes les sommes à la charge du locataire-gérant, ainsi que du paiement de celles dont le loueur des fonds pourrait être rendu responsable du chef du locataire-gérant mais aussi de la restitution des divers éléments du fonds de commerce loué, les parties conviennent le plus souvent de fixer un dépôt de garantie. Dans cas, il est généralement précisé que le dépôt de garantie est détenu à titre de nantissement et de gage, conformément aux dispositions des articles 2333 et suivants du Code Civil, et qu’il devra être déposé par le loueur de fonds, le jour de la cessation du contrat de location-gérance entre les mains d’un tiers en qualité de séquestre amiable, choisi d’un commun accord entre les parties à la signature du contrat de location-gérance. De même, le contrat de location-gérance prévoit qu’à sa cessation, si le loueur de fonds l’exigeait, le montant de toutes les sommes à recevoir par le locataire-gérant sortant, notamment le montant du stock, la balance des comptes de prorata si elle est créditrice, sera adjoint au dépôt de garantie, lequel sera remis, le même jour, au séquestre. Il est généralement précisé que le séquestre devra restituer le dépôt de garantie, au locataire-gérant sur justification du paiement des charges et frais généraux ainsi que des taxes et impôts dus par le gérant, dont le loueur de fonds pourrait être responsable et après obtention en outre, des mainlevées des oppositions éventuelles formées par les créanciers entre les mains du séquestre, le tout de sorte que le loueur de fonds ne soit personnellement l’objet d’aucune poursuite du chef des créanciers du locataire-gérant et ne subisse aucun recours.

Question n°5 : Qu’est-ce que la location-gérance avec investissement ?

FLS : Le contrat de location-gérance avec investissement présente la particularité d’exiger du locataire-gérant qu’il réalise un investissement, au moment de la signature du contrat, le plus souvent destiné à financer l’aménagement intérieur du fonds de commerce qu’il s’apprête à exploiter.

Dans ce cas, le locataire-gérant percevra le plus souvent – mais pas nécessairement – une indemnité au moment de la cessation du contrat de location-gérance.

Question n°6 : Le locataire-gérant peut-il bénéficier de la valorisation du fonds de commerce ?

FLS : A l’expiration du contrat, sauf stipulations contraires – rares en pratique –,  le preneur ne peut pas prétendre au renouvellement ou à une indemnité puisqu’il ne bénéficie pas de la propriété commerciale. Il est tenu de restituer le fonds de commerce auquel il a pu apporter une plus-value sans pouvoir prétendre à une indemnité sauf si le contrat a prévu cette possibilité.

Alternativement, le contrat de location-gérance peut prévoir le versement, au profit du locataire-gérant, d’une indemnité en cas de cessation du contrat ; l’hypothèse se rencontre essentiellement en pratique en cas de location-gérance avec investissement. Le principe même de l’indemnité de fin de contrat peut être subordonné à la réalisation de certaines conditions telles que notamment (i) l’expiration d’un délai minimum d’exploitation du fonds par le locataire-gérant, (ii) l’atteinte d’un chiffre d’affaires minimum, (iii) le parfait respect par le locataire-gérant des conditions du contrat de location-gérance ; cette liste n’est pas exhaustive.

Question n°7 : Dans quelles conditions le locataire-gérant peut-il bénéficier d’une promesse de vente du fonds de commerce ?

FLS : Cette possibilité est simple à mettre en œuvre.

Le contrat de location-gérance peut parfaitement comporter en effet une promesse de vente ; le preneur a ainsi la perspective de devenir propriétaire, le temps de gagner suffisamment d’argent pour acquérir le fonds.

Tout dépend de la volonté des parties au moment de la conclusion du contrat qui devront, en cas de promesse, veiller à fixer le prix de vente et ne pas imputer les redevances sur celui-ci au risque de voir l’administration fiscale requalifier le contrat en cession déguisée. En règle générale, les stipulations du contrat de location-gérance relatives à la promesse de vente qu’il peut contenir envisagent :

  • la faculté d’acquérir le fonds de commerce objet du contrat de location gérance ;
  • la période de temps durant laquelle le locataire-gérant pourra exercer son option d’achat, étant précisé que l’acte doit préciser que l’expiration prématurée du contrat de location gérance, pour quelque cause que ce soit, entraîne automatiquement résiliation de la promesse à compter du jour de la cessation du contrat de location gérance ;
  • la précision selon laquelle le bénéfice de la promesse de vente est strictement personnel et ne pourra profiter qu’au seul locataire-gérant ;
  • le cas échéant, en matière de franchise par exemple, que la promesse serait également nulle et non avenue pour le cas ou le locataire-gérant n’aurait pas, préalablement à l’exercice de son option d’achat, accepté la régularisation et signé un nouveau contrat de franchise.

Les stipulations du contrat de location-gérance envisagent également les conditions même de la vente issue de l’exercice de la promesse ; le plus souvent, il est alors précisé que la vente aura lieu sous les conditions suivantes :

  • l’acte de vente doit être signé dans une période déterminée après la réception de l’intention d’acquérir émanant du locataire-gérant selon les modalités telles qu’elles sont prévues par le contrat de location gérance ;
  • le locataire-gérant prend les divers éléments composant les fonds de commerce dans l’état où ils se trouveront le jour de l’entrée en jouissance, sans recours possible contre le vendeur, et paiera tous les frais, droits et émoluments de l’acte de réalisation et de ses suites ;
  • le prix et les modalités de paiement du prix.


Question n°8 : Existe-il pour le locataire-gérant des solutions alternatives à l’insertion d’une promesse de vente du fonds de commerce à son profit ?

FLS : Oui.

Il est possible de prévoir un droit de préemption au profit du locataire-gérant, appelé à pouvoir être mis en œuvre pour le cas où, avant la cessation du contrat de location-gérance, le propriétaire du fonds recevrait l’offre d’un tiers. Un droit de premier refus peut également être prévu.

Question n°9 : Le propriétaire du fonds de commerce pourrait-il obtenir une indemnité en cas d’annulation du contrat de location-gérance ?

FLS : La jurisprudence n’est pas encore parfaitement fixée à ce jour sur ce point. Toutefois, en droit pur, la nullité emporte l’effacement rétroactif du contrat et a pour effet de remettre les parties dans la situation initiale et, vu les dispositions de l’article 1304 du code civil, la remise des parties dans l’état antérieur à un contrat de location-gérance annulé exclut que le bailleur puisse obtenir une indemnité correspondant au profit tiré par le locataire-gérant au cours de l’exploitation d’un fonds de commerce dont il n’a pas lui-même la propriété.

Question n°10 : La location gérance demeure-elle un système d’exploitation très utilisé en pratique ?

FLS : Oui, et plus fréquemment qu’il n’y paraît.

On observe même, en période de crise, un recours croissant à cette forme d’exploitation dans les réseaux de distribution et de franchise qui peuvent ainsi se développer, tout en conservant la maîtrise de leur immobilier, en permettant aux distributeurs et aux franchisés, qui ne disposent pas de fonds personnels pour démarrer leur activité, de pouvoir se lancer.

Question n°11 : Comment la location gérance peut-elle se combiner avec un contrat de franchise ?

FLS : Le franchiseur confie un fonds de commerce dont il reste propriétaire à un franchisé qui est chargé d’exploiter ce fonds de commerce sous l’enseigne du franchiseur à ses risques et périls. Les deux contrats – de franchise et de location-gérance –  sont liés et sont conclus pour la même durée ; ils forment un ensemble contractuel et sont donc indissociables l’un de l’autre.

Le franchisé doit s’acquitter de redevances au titre du contrat de franchise mais aussi au titre du contrat de location-gérance et respecter les obligations qui découlent de chacun des contrats avec le franchiseur.

Le contrat de location-gérance peut comporter une promesse de vente du fonds de commerce, le franchisé a ainsi la perspective de devenir propriétaire, le temps de gagner suffisamment d’argent pour cette acquisition durant les premières années de l’exploitation. Si une telle promesse n’a pas été prévue, à l’issue du contrat, le franchiseur récupère le fonds de commerce, dont il est resté propriétaire, sans que le franchisé puisse exiger un renouvellement ou une indemnité puisqu’il ne bénéficie pas de la propriété commerciale.

Cette combinaison permet au franchiseur de se constituer un capital et de renforcer la valeur de son réseau du fait de ce patrimoine, tout en conservant la maîtrise de son implantation car il demeure propriétaire des fonds de commerce. Le franchisé, de son côté, a ainsi l’occasion de démarrer une activité en tant que commerçant indépendant sans nécessairement disposer de fonds importants pour le démarrage de son activité puisqu’il ne doit pas faire l’acquisition d’un fonds de commerce ; en outre, la clientèle est déjà existante, il doit la développer.

Question n°12 : De manière plus générale, quels sont les avantages et les inconvénients du développement de la franchise en location-gérance ?

FLS : Il y a des avantages et des inconvénients pour chaque partie.

Ce mode de développement emporte tout d’abord plusieurs avantages pour le franchiseur, à savoir :

  • le franchiseur est maître de son immobilier commercial ; Il peut ainsi acheter des fonds de commerce bien placés sans attendre de trouver un franchisé qui a les moyens de le faire et surtout en conserver la maîtrise puisqu’il est propriétaire ;
  • le franchiseur valorise son réseau lorsque les candidats franchisés n’ont pas les moyens de payer l’apport nécessaire, il dispose ainsi d’un capital qu’il peut amortir avec les redevances locatives ;
  • le système lui permet de développer le réseau mais cela suppose que le franchiseur ait les moyens d’acheter les fonds de commerce qu’il « loue » aux franchisés : c’est le franchiseur qui fait l’investissement de départ ;
  • les parties sont indépendantes : le locataire-gérant est un commerçant indépendant qui exploite le fonds de commerce à ses risques et périls (au contraire du gérant-mandataire).

Ce mode de développement emporte également plusieurs avantages pour le franchisé, à savoir :

  • la location-gérance permet au franchisé de se lancer en franchise sans disposer de fonds importants (chez Point chaud, on passe d’un apport initial d’un montant de 80.000 € à 30.000 € – de façon plus générale, on évalue à un tiers le montant de l’apport nécessaire par rapport à celui nécessaire lorsque le franchisé a son propre fonds de commerce) et de se constituer un capital pour acquérir ledit fonds de commerce (le contrat de location-gérance peut comporter une promesse de vente) ;
  • la location-gérance permet au franchisé de disposer d’une clientèle déjà constituée car le fonds de commerce doit avoir été exploité pendant 2 ans avant le passage en location-gérance. Le franchisé ne crée pas un fonds de commerce mais développe un fonds de commerce existant ;
  • le système permet au franchisé d’exploiter un fonds de commerce sans en être propriétaire et de se constituer un capital pour le racheter, si le contrat de location-gérance comporte une promesse de vente.

Mais ce mode de développement emporte des inconvénients pour le franchiseur, à savoir :

  • il existe un risque de requalification en contrat de travail, le franchiseur doit se montrer prudent et ne pas s’immiscer dans les affaires du franchisé/locataire-gérant, ce qui nécessite de changer les habitudes lorsque le franchisé est un ancien salarié ;
  • en application de l’article L.144-4 du code de commerce, le franchiseur reste responsable pendant 6 mois suivant la publication du contrat des dettes, et demeure solidaire sans limitation de durée du paiement des impôts directs établis en raison de l’exploitation du fonds ;
  • la durée minimum d’exploitation du fonds de commerce avant la mise en location-gérance est de 2 ans (sauf à ce que l’exception prévue à l’article L.144-5-8° du code de commerce joue, elle est prévue  en faveur du « loueur de fonds de commerce, lorsque la  location-gérance a pour objet principal d’assurer, sous contrat d’exclusivité, l’écoulement au détail des produits fabriqués ou distribués par lui-même»). Il est également possible de demander une autorisation judiciaire ; en effet l’article L.144-4 du code de commerce prévoit la possibilité d’obtenir une suppression ou une réduction du délai de 2 ans par ordonnance du président du TGI rendue sur requête de l’intéressé, le ministère public entendu, notamment lorsque celui-ci justifie qu’il est dans l’impossibilité d’exploiter son fonds personnellement ou par l’intermédiaire de préposés. Les motifs suivants sont invoqués pour justifier l’impossibilité d’exploiter personnellement ou par l’intermédiaire des préposés ont été accueillis : la conclusion du contrat de location-gérance pour une durée de vingt ans assurerait une gestion homogène des fonds créés et éviterait au gérant, entrepreneur indépendant, d’assumer des investissements (CA Versailles, 18 janv. 1988, D. 1988, IR 77 ; CA Paris, 1er déc. 1994, Petites affiches 25 août 1995, p. 8, note Y. Marot) ; le rôle du franchiseur serait de créer une chaîne de restauration rapide, d’assurer le contrôle de l’application du système, mais non d’exploiter directement les fonds de commerce, une gestion centralisée étant impossible étant donné le nombre élevé de restaurants, en l’espèce 280 (CA Paris, 1er déc. 1994, préc.) ; ou encore la dispersion géographique et la nécessité d’avoir recours à des personnes indépendantes et responsables implantées localement font qu’une exploitation par des préposés dispersés sur l’ensemble du territoire serait de nature à entraîner des coûts de gestion extrêmement lourds (CA Versailles, 18 janv. 1988, préc.). Toutefois, en sens inverse, des décisions ont refusé d’accorder une telle dispense au franchiseur en raison de l’intention spéculative (TGI Orléans, 5 nov. 1993, LPA 25 août 1995, p. 8 ; CA Montpellier, 29 janv. 1996, préc., à propos d’une chaîne de restauration rapide qui, après un refus d’obtention de dispense, avait installé un salarié pour exploiter le fonds de commerce, mais maintenu sa demande de dispense. La cour d’appel avait refusé de faire droit à sa demande, au motif, notamment, que le recours à un salarié démontre que le fonds n’est pas dans l’impossibilité de fonctionner). Est également inopérant l’argument selon lequel le franchiseur a déjà obtenu des dispenses pour d’autres fonds, car il ne peut prétendre « à un droit acquis une fois pour toutes à de telles dérogations, lui ouvrant la voie à l’établissement sans contrainte de nouveaux fonds de commerce » (TGI Orléans, 5 nov. 1993, préc.).

De même, ce mode de développement emporte des inconvénients pour le franchisé, à savoir :

  • à la cessation des contrats de franchise et de location-gérance (de même durée), le franchisé n’a rien puisque le fonds ne lui appartient pas – il ne tire pas de plus-value ;
  • le franchisé doit payer une redevance en sus de celle due au titre du contrat de franchise ;
  • le franchisé ne bénéficie pas de la propriété commerciale, à l’expiration du contrat de location-gérance, il ne peut prétendre à aucune indemnité ni aucun droit de renouvellement.

 

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NB : depuis la publication de cet interview, le 18 novembre 2009, l’article 31 de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques (dite « Loi Macron ») relatif aux relations contractuelles entre les réseaux de distribution et les exploitants de commerces de détail affiliés, introduit deux nouveaux articles (L. 341-1 et L. 341-2) au code de commerce, constituant le nouveau titre IV du livre III de ce code, intitulé « Des réseaux de distribution commerciale »  ; ainsi, selon l’article L.341-1 du code de commerce, « l’ensemble des contrats conclus entre, d’une part, une personne physique ou une personne morale de droit privé regroupant des commerçants, autre que celles mentionnées aux chapitres V et VI du titre II du livre Ier du présent code, ou mettant à disposition les services mentionnés au premier alinéa de l’article L. 330-3 et, d’autre part, toute personne exploitant, pour son compte ou pour le compte d’un tiers, un magasin de commerce de détail, ayant pour but commun l’exploitation de ce magasin et comportant des clauses susceptibles de limiter la liberté d’exercice par cet exploitant de son activité commerciale prévoient une échéance commune » ; puis à l’alinéa suivant ce texte prévoit que « la résiliation d’un de ces contrats vaut résiliation de l’ensemble des contrats mentionnés au premier alinéa du présent article » : CLIQUEZ ICI POUR EN SAVOIR PLUS

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